Critiquer le secteur viticole français a longtemps été de bon ton. On l’accusait notamment de reculer face au succès des vins du Nouveau Monde. Or nos vignerons, premiers exportateurs mondiaux, ont conservé depuis vingt ans une part de marché stable à l’international, de l’ordre de 14% en valeur. Cela s’explique en partie par le fait que beaucoup d’entre eux ont fait des progrès spectaculaires dans leurs méthodes de travail et dans l’élaboration de vins au goût du jour. Décryptage par deux spécialistes du secteur.

Vous venez nous parler d’une révolution viticole… Mais d’où sort cette histoire?

Mohamed Najim : D’un profond changement des goûts entamé dans les années 1990. Avant, les rouges étaient lourds, fermés ou, comme dans la Loire, "flotteux" et acides. Quant aux blancs, ils étaient souvent trop légers et sans caractère, sauf dans le Sud, où ils étaient chauds et indigestes. Même les AOC prestigieuses faisaient des vins durs, que l’on devait garder dix ans avant de pouvoir les boire. Et puis les vins de cépage du Nouveau Monde sont arrivés. Ils étaient souples, pleins de fruit, agréables. La jeune génération d’amateurs de vins s’est dit : "C’est ça que l’on veut, gardez vos vieux vins pour les banquets de notables."

Quel a été l’impact économique de ce changement fondamental pour la viticulture française?

Etienne Gingembre : Considérable… Il y a vingt ans, les cassandres annonçaient la fin de nos vieux terroirs, balayés par le Nouveau Monde. C’est tout l’inverse qui s’est produit. La révolution a complètement relancé la filière, nos exportations passant de 5,5 milliards d’euros en 2000 à 9,8 milliards en 2019, avec un excédent de 8 milliards, juste derrière les Airbus et devant l’industrie du luxe de Bernard Arnault et François Pinault. La viticulture passionne les jeunes, c’est notre patrimoine culturel et matériel que défendent chaque jour 600.000 professionnels.

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