Pas une semaine ne se passe sans que les saillies et les coups de menton d’Elon Musk viennent électriser les réseaux sociaux. Un jour, le milliardaire défie Poutine en combat «d’homme à homme» pour en finir avec la guerre en Ukraine, le lendemain, il assure qu’il vendra dès 2025 des robots humanoïdes ultrasophistiqués à moins de 20000 dollars, avant de s’alarmer des progrès fulgurants de l’intelligence artificielle, une technologie, selon lui, «plus dangereuse que l’arme nucléaire pour l’humanité». Pas toujours facile de suivre le fil de la pensée «muskienne»… Seule certitude, le patron de SpaceX, Tesla ou encore Twitter est obsédé par la conquête de Mars, qui doit faire de nous une espèce multiplanétaire et sauvegarder ainsi l’humanité, étant entendu, d’après Musk, que les coups de boutoir de l’homme ont d’ores et déjà condamné notre bonne vieille planète Terre. Un messianisme technophile à garder à l’esprit pour appréhender la galaxie muskienne qui, entre fusées, bolides électriques, panneaux photovoltaïques, tunnels, Internet par satellite… peut sembler aussi géniale que décousue.

Même quand il rachète Twitter, c’est, selon ses dires, pour sauver une liberté d’expression qu’il estime en péril. Mais, qu’on aime ou qu’on abhorre le personnage, force est de constater que personne avant lui n’a réussi à renverser la table dans autant d’univers différents à la fois. Entrepreneur aussi génial que borderline, sans filtre ni surmoi, Elon Musk est un véritable personnage de roman fait d’ombre et de lumière. Notre rédacteur en chef, Emmanuel Botta, et Béatrice Mathieu, grand reporter à «L’Express», ont enquêté durant près de deux ans pour tenter de comprendre le phénomène Musk. Extraits.

Le visionnaire

Comme souvent, Elon est en retard. Trop de choses à faire, trop de gens à voir… Le milliardaire a beau travailler comme un damné, les journées de vingt-quatre heures ne suffisent pas à absorber le rythme et les ambitions de l’ogre Musk. Mais l’ingénieur n’aurait raté ce dîner pour rien au monde. Il déploie sa grande carcasse pour s’extraire de sa Tesla et presse le pas en rejoignant le Rosewood, un hôtel tape-à-l’œil aux airs de ranch, situé sur les hauteurs de Menlo Park, en Californie, et fréquenté par le gratin des startupeurs de la Silicon Valley. Nous sommes au début du mois de juin 2015 et le soleil déclinant pare les collines alentour d’un délicat voile rose. Un spectacle somptueux auquel Musk ne prête pas la moindre attention. Pas le temps.

Il n’a de toute façon jamais été du genre contemplatif. Il pénètre à grandes enjambées dans la salle privée réservée par son vieil ami Sam Altman, le patron du Y Combinator, le plus puissant incubateur de start-up au monde. Les deux hommes s’admirent et se respectent. Ils peuvent passer des heures à discuter de leur vision de l’avenir, des possibilités et des limites de l’allongement de la durée de vie de l’espèce humaine, mais aussi et surtout de l’inexorable essor de l’intelligence artificielle (IA).

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