
Livraison express, envois et retours gratuits, choix large, 100 nuits d’essai… Voilà déjà plusieurs années que le business de la vente de matelas en ligne se développe et séduit sa clientèle. De nouvelles marques spécialisées sont apparues, comme l’allemand Emma Matelas, le français Tediber ou encore Ecomatelas (produits reconditionnés), pour venir concurrencer les enseignes traditionnelles telles que La Maison de la literie, ou la Compagnie du Lit. Mais ce n’est apparemment pas un business de tout repos… à en croire la guerre que se livrent, à la barre des tribunaux, deux des nouveaux venus du secteur. Car pour attirer les clients, certains sont prêts à tout !
Dernière affaire en date ? Le groupe français Tediber, qui accuse son rival Emma Matelas de pratiques commerciales trompeuses et déloyales entre 2018 et 2021. La cour d’appel de Paris a tranché il y a quelques jours : Emma a écopé d’une amende de deux millions d’euros à verser à Tediber. Et ce n’est pas tout : il devra également afficher cette condamnation sur son propre site. De quoi faire tache, sur un matelas pourtant censé incarner le confort parfait.
Les faits reprochés à ce groupe allemand ? Une mécanique marketing trop bien huilée, et en réalité abusive. Qui passait notamment par de fortes promotions, annoncées comme temporaires, alors même qu'elles étaient en réalité permanentes, et largement trompeuses. Explications. Emma Matelas a augmenté de 30 à 40% le prix de ses matelas pour appliquer ensuite des promotions du même ordre. In fine, le prix du matelas reste donc le même alors que le consommateur a le sentiment de faire une affaire en or !
Un système de promo qui affaiblit les concurrents
Difficile de justifier de telles pratiques commerciales. «Le prix de référence avant la promotion doit être celui le plus bas pratiqué au cours des 30 derniers jours, c’est la loi. Impossible alors de faire des promotions avec un tarif de référence inchangé pendant quatre ans», nous explique Julien Sylvain, fondateur de Tediber. Autre problème : avoir mis en place sur son site internet des faux compteurs, destinés à faire croire aux consommateurs que la fin de la promotion était imminente. «Le client, pensant qu’il ne lui reste que quelques heures pour réaliser une bonne affaire, se presse pour acheter l'article», ajoute le fondateur. Contacté par Capital, Emma Matelas France n’a pas souhaité donner des explications quant à ces pratiques. Avant de se soumettre à sa condamnation, la société allemande a encore une dernière carte à jouer : elle a jusqu’au mois de septembre 2025 pour se pourvoir, ou non, en cassation.
Fondée en 2013, Emma Matelas a réalisé un chiffre d’affaires d’un milliard d’euros en 2024, dont 200 millions en France, tandis que Tediber, créé en 2015, affiche des ventes à 45 millions d'euros en 2024. «Le succès d’Emma repose sur la promo. Avec ce système illégal, ils réussissent à capter une clientèle et affaiblissent les concurrents», explique Julien Sylvain. Tediber n’est d’ailleurs pas le seul à avoir engagé des poursuites à l’encontre d’Emma Matelas. Les autorités administratives étrangères comme la Competition & Markets Authority (CMA) au Royaume-Uni, et l’Australian Competition & Consumer Commission (ACCC) ont annoncé des actions similaires pour protéger leurs consommateurs et le fonctionnement de leurs marchés nationaux.
Tediber pourrait mener de nouvelles actions
Pour Emma, toute cette histoire n’est plus qu’un lointain souvenir. «Depuis 2021, aucun manquement n’a été relevé. Cette absence de constat d’infraction sur les années récentes nous semble importante à souligner, car elle reflète l’évolution de nos pratiques», nous confie la filiale française du groupe allemand. Mais Tediber ne l’entend pas ainsi. La marque française pointe du doigt de nouveaux contournements : des promotions qui s’alterneraient tous les 30 jours, entre deux modèles de matelas quasi identiques. Une façon subtile de rester dans les clous… tout en maintenant la pression commerciale. «Nous allons mener de nouvelles actions», assure Julien Sylvain.



















