En 2023, 18% des foyers français étaient équipés de climatiseurs selon le baromètre Sobriétés et Modes de vie 2024 de l'Ademe (l'Agence de la transition écologique). Un chiffre qui a sans doute augmenté depuis cet été, à en croire les audiences de notre guide des meilleurs climatiseurs mobiles et la pénurie chez les distributeurs. Mais savez-vous combien ils vous coûtent réellement au quotidien ?

Le problème du coût des climatiseurs

Le prix moyen d'un climatiseur mobile est déjà assez élevé en temps normal, mais depuis la canicule de juin et juillet 2025, il aurait bondi de 10% à 620€ selon nos confrères de l'UFC Que Choisir. Pour connaître l'impact financier réel de ces appareils, il faut ajouter à cette somme le coût d'éventuels accessoires (kit de calfeutrage s'il n'est pas fourni, nécessaire de drainage si besoin...), et bien sûr, la consommation d'énergie au quotidien. Il est de notoriété publique que les climatiseurs, mobiles ou non, sont très énergivores, mais à quel point ? De combien exactement peuvent-ils faire grimper la facture ?

Au Labo Capital, nous testons des climatiseurs mobiles tous les ans, y compris leur consommation. Plus simples et rapides à installer, souvent moins coûteux puisqu'ils ne nécessitent pas l'aide d'un technicien, ils seraient cependant 2,5 fois plus voraces en énergie que les climatiseurs split (les modèles fixes placés au mur ou au plafond) selon l'Ademe. Pourtant, la plupart des modèles que l'on trouve sur le marché sont affublés d'une étiquette énergie avec la note A ou A+.

Le problème, c'est que leur consommation est très variable. Elle dépend de nombreux facteurs : la puissance du climatiseur, ses réglages, le temps d'utilisation, la taille de la pièce traitée, la température du logement, la région où vous habitez, l'isolation, les tarifs de votre fournisseur d'énergie... Un vrai casse-tête. Difficile donc de se faire une idée de leur impact réel sur nos factures. C'est pourquoi nous avons décidé de mener une expérience.

Notre expérience de consommation d'énergie

Les modèles que nous testons au laboratoire sont variés, allant de l'entrée au haut de gamme et provenant de divers constructeurs comme De'Longhi, Whirlpool, Electrolux... Les plus courants sur le marché sont les modèles Non-Inverter, c'est-à-dire que leur compresseur s'active pour refroidir ou s'éteint complètement, mais il ne peut pas tourner plus ou moins rapidement selon la tâche (refroidissement ou maintien de la température). Cela implique un fonctionnement en dents de scie avec des cycles de forte consommation d'énergie.

© Sandra Nicoletti pour Capital

Pour cette expérience, nous avons retenu le Beko BP1095CN, dont nous avons publié le test complet récemment. Cela parce que la consommation indiquée sur son étiquette énergie se trouve dans la moyenne du marché, à 1kWh pour 60min de fonctionnement (note A) et qu'il s'agit d'un modèle Non-Inverter tout ce qu'il y a de plus classique.

D'après nos estimations basées à nouveau sur les données de l'Ademe, mais aussi sur celles de l'Union européenne, la durée d'utilisation moyenne quotidienne des climatiseurs lors des périodes de chaleur se situerait entre 5 et 10 h en cumulé. Nous avons choisi la tranche basse de 5h/jour et laissé fonctionner le climatiseur Beko pendant 3 jours (15h au total), entre mardi 1er juillet 2025 (pic de canicule avec jusqu'à 37°C en extérieur en Île de France) et jeudi 3 juillet (températures d'été plus raisonnables), dans notre laboratoire de test de 13 m2.

Toujours selon l'agence de l'Etat, les consommateurs français règlent leur climatiseur sur 23°C en moyenne (bien en-dessous des 26 recommandés). Nous avons donc fait la même chose, toutefois il est à noter que notre laboratoire de test affichait déjà des températures correctes sans la climatisation (entre 25 et 27°C). L'appareil devait abaisser la température de 2 à 4°C et la maintenir quelques heures. On peut dire que cette expérience se base donc sur un usage assez raisonnable avec un climatiseur dans la moyenne.

L'appareil était enfin raccordé à notre prise / wattmètre connecté Tapo P110, afin de mesurer finement sa consommation et son comportement énergétique. D'ailleurs, on vous recommande vivement l'achat d'un accessoire comme celui-ci si vous souhaitez mieux contrôler votre usage et réduire vos factures d'électricité.

Les résultats sur notre facture

Sur ces trois jours de test, le climatiseur a consommé un total de 8,8 kWh, soit une moyenne de quasiment 3 kWh par jour (5h) et 586,7 Wh/60min. C'est presque deux fois moins que la consommation annoncée sur l'étiquette énergie (nous reviendrons sur ce point plus tard). Toutefois si l'on extrapole un peu, cela nous donne une consommation mensuelle d'environ 88 kWh. Mais alors, combien ça coûte concrètement ? Voici la réponse, calculée en prenant pour référence le tarif réglementé d'EDF (tarif de base hors abonnement) :

Un coût non-négligeable de 12 centimes d'euro par heure, qui donne une facture mensuelle de 17,7 euros pour ce seul appareil, s'il fonctionne 5h/jour, et plus de 35€/mois si on double l'usage à 10h/jour. Bien sûr, ces résultats ont valeur d'exemple, ils ne sont probablement pas applicables à votre cas personnel en raison des trop nombreuses variables énoncées plus haut. Ils peuvent toutefois vous donner une idée de votre future dépense si vous habitez comme nous en région parisienne et appliquez les mêmes réglages.

Par ailleurs, la consommation de l'appareil diffère aussi selon la température extérieure. Contrairement aux climatiseurs split, les climatiseurs mobiles nécessitent de faire passer leur tuyau par la fenêtre, ce qui laisse entrer de l'air chaud dans la pièce et complique plus ou moins le travail du climatiseur selon l'efficacité de votre calfeutrage. Pour vous donner un peu plus de détails, voici le coût et la consommation des trois jours de notre expérience :

Comme vous pouvez le constater, en cas de canicule, votre climatiseur mobile vous coûtera sensiblement plus cher. Dans notre cas, la facture du jour le plus chaud a augmenté de 25% environ par rapport à notre moyenne des trois jours. Le jour le moins chaud a quant à lui engendré une baisse de 20% environ. Entre un jour à 27°C max et un jour à 37°C max, l'écart monte à 36,5%. Vous pouvez même anticiper une facture encore plus élevée si votre température intérieure est plus haute que la nôtre.

Calcul de l'étiquette énergie et règles en UE

Le calcul de l'étiquette énergie, présente sur tous les climatiseurs en Europe, est bien plus complexe et fin que notre expérience maison. Sa méthodologie est décrite dans l’Annexe VII du règlement délégué (UE) n° 626/2011 de la Commission du 4 mai 2011. Pour écrire la valeur « 1 kWh/60 min » sur l’étiquette, le laboratoire opérant les tests reconstitue un été européen type à partir de mesures faites en chambre climatique.

Concrètement, on place l’appareil entre deux enceintes : l’une reproduit l’air intérieur maintenu à 27°C (humidité réglée), l’autre imite l’air extérieur successivement à 17°C, 20°C, 25°C et 35°C. À chacune de ces quatre températures, on laisse la machine se stabiliser, puis on relève d’un côté la puissance de froid réellement fournie (en kilowatts) et, de l’autre, l’électricité absorbée (en kilowatts également). Ces couples « froid produit / énergie consommée » donnent quatre rendements instantanés, appelés EER. S’il s’agit d’un modèle non-inverter qui démarre et s’arrête sans cesse, on applique ensuite un petit coefficient correctif car le redémarrage d’un compresseur consomme plus qu’un fonctionnement continu, et la méthode officielle veut refléter cette perte.

© Beko / Commission européenne

Vient alors la partie « passe d’addition ». L’Europe a défini un tableau météo (« la méthode des bins ») qui indique combien d’heures, en moyenne, un été européen passe à 17°C, 20°C, 25°C, 30 °C, 35 °C, etc. (au total 2 602 heures de fonctionnement pour la saison chaude). Le laboratoire multiplie la consommation électrique mesurée à 20°C par le nombre d’heures à 20°C, celle relevée à 35°C par les heures à 35 °C, et ainsi de suite. On ajoute également les watts dépensés quand le climatiseur est en simple ventilation, en veille ou branché mais arrêté. Ces petits postes comptent parce que l’appareil reste souvent alimenté même quand il ne rafraîchit pas. Une fois tous ces kilowatt-heures additionnés, on obtient la consommation totale de l’été moyen. Pour que l’utilisateur lise un chiffre simple, le règlement impose de diviser ce total par les 2 602 heures de fonctionnement. Cela donne nos « 1,0 kWh/60 min ».

Toutefois, vous l'aurez peut-être anticipé : comme ces calculs se basent sur une moyenne de températures européennes et non françaises, l'étiquette non plus n'est pas représentative de votre cas personnel, ni d'un usage dans votre région où le nombre de jours chauds et les températures réelles extérieures sont différents de la moyenne européenne. Comme quoi, estimer la consommation d'un climatiseur n'est pas seulement un casse-tête pour vous, ça l'est aussi pour les institutions...

Pour finir en vous donnant un peu froid dans le dos, voici à quoi ressemblerait notre tableau de coûts chez EDF si l'on prenait pour base la consommation indiquée sur l'étiquette énergie de notre climatiseur de test :

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