« Ce sont souvent les métiers qui m’ont choisie », confie Athina Argyriou. Son arrivée à la présidence déléguée de la CSIAM (Chambre Syndicale Internationale de l'Automobile et du Motocycle). – qui représente l’ensemble de la filière automobile, des véhicules industriels aux deux-roues – ne relève pas d’un plan de carrière, mais d’un parcours nourri par la curiosité, le travail et les opportunités saisies au bon moment.

Trois ans après sa nomination, la dirigeante avoue une passion sincère pour un secteur qu’elle voit comme une clé du renouveau économique et de la souveraineté industrielle. Et dans un moment particulièrement chahuté pour la filière, elle y voit un carrefour d’enjeux économiques, géopolitiques, sociaux et écologiques, notamment depuis la transition vers des mobilités plus durables.

Athina Argyriou reconnaît que les femmes y sont encore rares à des postes de direction. Elle-même a souvent été « la seule femme autour de la table », nous confie-t-elle. Pourtant, elle a su se faire élire par ses pairs à deux fonctions clés : directrice générale opérationnelle, et présidente déléguée élue, rôle qui impose de la neutralité et de la représentativité. Preuve de la confiance accordée.

Pour rééquilibrer les lignes, elle a constitué une équipe féminine, engagée et compétente, non pas par militantisme mais parce que, dans les domaines comme les affaires publiques, les femmes y excellent souvent. Elle souligne : « Les process sont transparents. Ce sont les qualités qui priment. »

Un leadership managerial

Son style de management repose sur la proximité, l’autonomie et la responsabilisation. « Je laisse l’espace à chacun pour imprimer sa personnalité dans les projets. » Mais cela n’exclut ni l’exigence ni la capacité à recadrer. Elle refuse les raccourcis entre bienveillance et laxisme : « Manager, ce n’est pas devenir amie, c’est garder l’objectivité pour guider au bon moment. »

Athina Argyriou incarne un leadership nourri par l'expérience, l'écoute et une grande capacité d’introspection. « Je me suis toujours demandé : comment je peux faire mieux ? » Une posture exigeante, l'autre marque de fabrique de la dirigeante. « Ce qui me plaît, c’est de fédérer autour d’une vision. »

Pour elle, les réseaux restent essentiels, même si leur nature a changé : plus transactionnels aujourd’hui qu’auparavant, quand la parole suffisait. Elle y voit un devoir pour les dirigeantes d’aujourd’hui : montrer que l’on peut y arriver, transmettre, donner l’exemple. Elle défend d’ailleurs les quotas dans les conseils d’administration comme un levier nécessaire pour accélérer l’inclusion, face à un univers encore très masculin.

Briser les plafonds, inspirer les vocations

Athina Argyriou ne dissimule pas les défis : être femme, présidente, dans un secteur en crise, avec une pression constante. Elle parle avec lucidité de ses responsabilités, qu’elle « emmène parfois jusqu’à la maison, au détriment du sommeil ». Pour trouver l’équilibre, elle a appris à piloter des avions, et surtout à se ménager des moments de silence, sans culpabiliser : « Il faut accepter que notre ‘mieux’ ne soit pas parfait. »

C’est cette force intérieure qu’elle veut transmettre aux autres femmes : « S’imposer dans un environnement hostile demande une force de caractère hors norme. » Et elle sait que ce sont les victoires collectives – projets qui aboutissent, équipes soudées – qui forgent la confiance. Parmi ses sources d’inspiration : Farah Mohamed, sénatrice au Canada, dont le parcours l’émeut.

Son message aux jeunes femmes, notamment celles qui rêvent d’intégrer l’industrie automobile : « Ce qui compte, ce n’est pas la difficulté, c’est l’envie. » Un mantra, quel que soit le secteur.