Ils sont les premières victimes de l'épisode inflationniste inédit qui pénalise les Français depuis 2021. Selon une note publiée cette semaine par le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l'âge (HCFEA), instance consultative chargé d’éclairer les décisions publiques liées aux politiques familiales, les prix à la consommation ont en effet augmenté plus vite que le montant des prestations sociales, ces quatre dernières années. Ce qui s’est traduit par une perte de pouvoir d'achat cumulée pour les bénéficiaires de ces prestations, selon le HCFEA. Pour compenser cette baisse de revenus liée à l'inflation, l’instance à Matignon recommande donc le versement exceptionnel d’une prestation familiale de solidarité.

Précisons pour débuter que la quasi-totalité des dispositifs sociaux sont déjà revalorisés en fonction de l’inflation. C’est notamment le cas des prestations familiales versées par la CAF, et des prestations de solidarité, comme le revenu de solidarité active (RSA) et la prime d’activité. Depuis 2016, cette revalorisation intervient une fois par an en fonction de l’inflation de l’année passée, alors qu'auparavant, elle se basait sur une prévision d’inflation future.

Concrètement, les prestations sociales sont revalorisées chaque année, au 1er avril. Vous l’aurez compris, la hausse des allocations est indexée sur l’inflation de l’année précédente (N-1). De ce fait, les allocations sociales, comme le RSA, sont ajustées avec retard sur l’évolution des prix. Lorsque l’inflation est faible et stable, ce retard a peu d’effet sur le pouvoir d’achat de ces prestations. En revanche, si l'inflation s’envole, comme c’était le cas entre 2021 et 2024, la revalorisation des prestations sociales chaque année ne compense pas totalement la perte de pouvoir d'achat subie par les ménages.

660 euros de perte de pouvoir d'achat pour une famille avec trois enfants

Plusieurs raisons expliquent pourquoi les ménages qui bénéficient des allocations sociales voient leur pouvoir d'achat baisser durant les périodes d'inflation. D'abord, parce que la plupart des prestations sociales sont indexées sur un indice des prix à la consommation hors tabac (IPC). Ce qui crée un décalage entre la revalorisation des allocations et les prix réels à la consommation, qui incluent le tabac. De plus, la revalorisation des prestations sociales a été sous-évaluée en 2019 et 2020 pour des raisons budgétaires, ce qui provoque une nouvelle perte de pouvoir d'achat. Enfin, selon le HCFEA, en période de forte inflation, la règle consistant à revaloriser les allocations en fonction de l’inflation passée, moyennant un certain retard, se traduit par une nouvelle perte de pouvoir d'achat pour les allocataires. En effet, quand l’inflation accélère, le coefficient utilisé pour revaloriser les prestations sociales est inférieur à l’inflation subie au même moment par les ménages.

Partant de ce constat, le HCFEA recommande à l'exécutif «d’effectuer un versement exceptionnel de prestations familiales et de solidarité pour compenser les fortes pertes cumulées durant l’épisode inflationniste». Selon les calculs de l’instance, un couple avec trois enfants âgés de 3 à 14 ans disposant de faibles revenus et percevant les allocations familiales (sans majoration pour âge) et le complément familial majoré aura ainsi perdu autour de 660 euros entre avril 2021 et mars 2025. Le montant du «versement exceptionnel» pourrait donc atteindre ce montant pour une famille de quatre personnes.

Reste à savoir si le gouvernement va suivre les recommandations du HCFEA, dans une période où l'exécutif est à la recherche d’économies pour tenter de réduire la dette publique. Contacté par Capital, le cabinet du Premier ministre n’a pas répondu à nos sollicitations.