Un médecin parti à la retraite qui reprend son activité parce qu’il n’a pas trouvé de remplaçant. Un commerçant qui revient dans sa boutique, faute de repreneur. Les situations qui peuvent pousser un professionnel indépendant ou libéral à recommencer à travailler alors qu’il était parti à la retraite sont nombreuses. Le cumul emploi et retraite est tout à fait possible pour ces activités. Il répond à des règles différentes de celles des salariés.
Il existe cependant un point commun quel que soit votre statut. Si vous partez à la retraite alors que vous n’avez pas cotisé suffisamment de trimestres pour bénéficier d’une pension à taux plein, votre cumul emploi retraite sera plafonné. Mais, contrairement aux salariés pour lesquels les revenus et la retraite ne doivent pas dépasser un certain montant, pour les professions non salariées, c’est uniquement le revenu d’activité qui est concerné par cette limite.
Des possibilités pour éviter le plafond
Pour éviter ce plafond, il vous faudra partir à la retraite uniquement lorsque vous aurez le taux plein. «Ce plafond est un vrai frein au cumul emploi retraite, estime Marilyn Vilardebo, fondatrice du cabinet spécialisé en retraite Origami&Co. Avant de cumuler, vous avez intérêt à bien reconstituer votre carrière et à être sûr de votre âge à taux plein», conseille-t-elle
Le plafond à ne pas dépasser dépend de votre situation. Il n’est pas le même pour une profession libérale et pour un commerçant ou un artisan. Afin de vous aider à prendre une décision, Capital, avec Origami&Co, a réalisé des simulations pour savoir, en fonction de votre situation, à partir de quel moment il peut être le plus intéressant financièrement de cumuler emploi et retraite.
Des exemples pour vous aider dans votre choix
Pour faciliter la lecture de ces tableaux, tous nos exemples sont nés en décembre 1962 et ont des revenus mensuels de 2 900 euros brut. Leur âge légal de départ est de 62 ans et 6 mois. Nos exemples auront leur taux plein à 65 ans et 3 mois. A noter que la réforme des retraites de 2023 permet aujourd’hui de cumuler de nouveaux droits lorsque vous partez définitivement à la retraite. Ce qui veut dire qu’après votre «deuxième départ», votre pension augmentera.
Pour les indépendants, qu’ils soient commerçants ou artisans, s’ils reprennent une activité alors qu’ils ont liquidé leur retraite à taux plein, ils ne peuvent pas gagner plus d’un demi plafond de la Sécurité sociale par mois, soit 1 932 euros brut. Ce qui limite rapidement leur cumul. Une exception cependant. Si cet indépendant est installé dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) ou dans un quartier prioritaire de politique de la ville, la limite est relevée à un plafond de la Sécurité sociale, soit 3 864 euros brut par mois. Ce plafond est le même pour les professions libérales.
Première situation : reprise d’activité d’un commerçant hors des zones «prioritaires»
On le voit, notre commerçant, en reprenant une activité lui permettant de gagner 1 500 euros brut, n’est pas concerné par le plafond. En effet, celui-ci ne démarre qu’à partir du moment où le revenu d’activité dépasse 1 932 euros brut par mois. Pour prendre sa décision, il devra donc surtout se référer à son niveau de pension. S’il part dès qu’il a l’âge légal (soit 62 ans et 6 mois), il touchera une pension de 1 280 euros brut.
La décote subie est forte puisque s’il attend d’avoir cotisé suffisamment de trimestres pour partir avec une retraite à taux plein (à 65 ans et 3 mois), il touchera alors 1 659,90 euros brut par mois. Il gagnera donc 379,90 euros de plus par mois s’il choisit de travailler presque trois ans de plus.
Dans ce deuxième exemple, notre commerçant est touché par le plafond immédiatement car il gagne 2 000 euros, soit 68 euros de plus que les 1 932 euros brut autorisés. Ensuite, quelle que soit sa date de départ, à partir du moment où il n’a pas encore le taux plein, la perte est de 68 euros par mois. Perte qu’il ne subira plus en attendant 65 ans et 3 mois pour partir à la retraite.
L’écart sera maximal s’il décide de partir seulement quelques mois avant son âge du taux plein (65 ans et 3 mois). Par exemple, s’il prend sa retraite à 65 ans et reprend dans la foulée une activité lui permettant de gagner 2 000 euros par mois, il touchera alors 3 558,90 euros par mois. Et s’il travaille trois mois de plus pour partir à la retraite sans décote, il pourra alors toucher plus de 100 euros supplémentaires par mois (3 659,90 euros). Un gain qui pourrait alors l’inciter à travailler trois mois de plus.
Notre exemple part à la retraite et reprend ensuite une activité lui permettant de gagner le même revenu qu’avant, soit 2 900 euros brut par mois. Dans ce cas, s'il part dès qu’il a l’âge légal, ses revenus seront plafonnés à hauteur de 1 932 euros brut par mois. Il perdra donc 968 euros brut (2 900 - 1 932) par mois. Il n’a donc pas intérêt à cumuler emploi et retraite s’il prend sa retraite dès son âge légal.
Mieux vaut donc qu’il attende d’avoir le taux plein pour cumuler emploi et retraite. Afin de mesurer l'intérêt d’une telle décision, comparons ses revenus perçus s’il part à 65 ans ou s’il attend 65 ans et trois mois (son âge du taux plein). En cumulant emploi et retraite lorsqu’il soufflera sa 65e bougie, notre commerçant gagnera 3 558,90 euros. En attendant simplement trois mois de plus pour prendre sa retraite, le total de sa pension et de ses revenus atteindra 4 559,90 euros, soit plus de 1 000 euros brut par mois.
Ce choix d’attendre ou non le taux plein reste un arbitrage personnel. «La réflexion peut porter sur le gain que vous pouvez quand même avoir en cumulant emploi et retraite même si vous êtes à taux minoré, préconise Marilyn Vilardebo. Ne pas cumuler emploi et retraite dès que vous pouvez cesser votre activité peut être considéré comme une perte. C’est la raison pour laquelle c’est compliqué.»
Deuxième situation : un commerçant (en zone prioritaire) ou un professionnel libéral reprend une activité
Dans le cas de notre commerçant en zone prioritaire ou de notre professionnel exerçant une activité libérale, le plafond, en cas de cumul emploi retraite avant le taux plein, est fixé à un plafond de la Sécurité sociale, soit 3 864 euros brut. Si notre exemple reprend une activité lui permettant de gagner 1 000 euros par mois, il ne sera jamais concerné par le plafond. En effet, ses revenus ne dépasseront pas 3 864 euros brut par mois. Il peut donc très bien décider de cumuler emploi et retraite dès qu’il a atteint l’âge légal, il n’aura en effet aucun manque à gagner.
Ce qui peut jouer dans son choix est plutôt son niveau de pension. S’il part dès l’âge légal, il touchera 1 280 euros brut, alors que s’il attend d’avoir cotisé suffisamment de trimestres pour obtenir le taux plein, soit 65 ans et 3 mois, sa pension grimpera à 1 659,90 euros brut par mois. Même si le cumul emploi retraite, depuis la réforme de 2023, peut lui permettre d’accumuler de nouveaux droits pour sa retraite et donc d’augmenter sa «deuxième pension», le gain sera uniquement de quelques dizaines d’euros par mois contre 379,90 euros entre une retraite à l’âge légal et une retraite à taux plein.
En reprenant une activité lui permettant de gagner 2 000 euros par mois, notre exemple n’est toujours pas concerné par le plafond du cumul emploi retraite. Il n’a donc aucune «pénalité» s’il veut partir à la retraite dès qu’il a atteint l’âge légal et ensuite reprendre une activité.
Comme pour notre premier exemple, ce qui compte dans le choix est avant tout le niveau de la pension. A noter aussi que la réforme des retraites de 2023 permet de cumuler de nouveaux droits uniquement si votre cumul emploi retraite est intégral. S’il est plafonné, parce que vous prenez votre retraite avant d’avoir le taux plein, vous ne pourrez pas bénéficier de ces nouveaux droits.
>> Notre service - Faites des économies en testant notre comparateur d’Assurances Santé
- Accès à tous les articles réservés aux abonnés, sur le site et l'appli
- Le magazine en version numérique
- Navigation sans publicité
- Sans engagement
