
Avec une piscine flambant neuve dans sa maison de la Sarthe, Olivier craignait de voir sa facture d’électricité s’envoler. Pour l’éviter, au printemps dernier, cet ingénieur quadragénaire s’équipe d’un petit panneau solaire à brancher sur une simple prise électrique. D’abord posée sur la pelouse non loin du bassin, puis placée sur le toit du cabanon de jardin, l’installation a produit 50 kilowattheures par mois pendant l’été. Mais, en décembre… moins de 10 kilowattheures ! Bilan au terme d’une année pas franchement ensoleillée : 70 à 80 euros d’électricité économisée. C’est modeste, mais toujours bon à prendre.
Portés par les inquiétudes sur le coût de l’énergie, les kits solaires à installer soi-même (ils sont dits «plug and play») rencontrent un succès croissant. Il s’en vend par dizaines de milliers, sur Internet, dans les magasins de bricolage et même en hypermarchés. Un engouement qui ferait presque oublier que ces installations ne sont pas sans risque électrique.
Les kits solaires sont simples à installer
Il est vrai que, sur le papier, elles ont tout pour plaire. Avec des premiers prix autour de 500 euros, elles ne nécessitent aucun recours à un installateur. La crainte d’être abusé par un professionnel peu scrupuleux, fréquente lorsque l’on installe des panneaux plus puissants sur son toit, disparaît : «Ces kits lèvent les freins au développement du solaire. Ils permettent d’apprivoiser la technologie en toute confiance», vante Ralph Feghali, cofondateur de Beem Energy, un des précurseurs.
Il suffit de déballer, de poser au sol et de brancher : «Ça m’a pris moins de cinq minutes» assure Olivier, notre Sarthois. Une telle rapidité ne concerne toutefois que les modèles prémontés en usine, parfois vendus sous l’appellation «station solaire». Les kits à proprement parler nécessitent, eux, de manier un peu le tournevis – même si l’affaire se règle souvent en une demi-heure.
Côté paperasse, difficile de faire plus simple. Une banale déclaration (la «convention d’autoconsommation») à remplir auprès du gestionnaire de réseau électrique, Enedis. Pas d’autorisation d’urbanisme à décrocher, hormis quelques cas particuliers : fixation à plus de 1,80 mètre en hauteur ou logement situé en zone «Bâtiments de France». L’installation est même envisageable pour les locataires : «On peut emporter les panneaux lorsque l’on déménage», souligne Thomas Cautier, à la tête de Sunethic, un fournisseur installé à Avignon. En copropriété, toutefois, mieux vaut bien se renseigner : certains règlements d’immeuble interdisent ces kits ou contraignent leur positionnement.
Une fois en service, l’électricité produite est injectée dans le logement via la prise, pour être autoconsommée. Mais gare aux simulations optimistes : les revendeurs affichent des économies cumulées sur dix, voire vingt-cinq ans ! D’une puissance limitée, ces panneaux sont destinés à absorber la consommation «de fond», celles des appareils branchés en permanence (réfrigérateur, box…) Les spécialistes parlent du «talon de consommation» : «Cela représente 10 à 20% de la consommation totale d’une famille : on peut le couvrir avec un ou deux panneaux de 400 à 500 watts chacun», estime Vincent Arrouet, cofondateur de Sunology, un autre fournisseur. D’ailleurs, ces kits sont souvent achetés par deux.
TITRE À TROUVER
LES ATOUTS
- Grande rapidité d’installation. Certains modèles livrés déjà montés sur leur socle nécessitent moins de cinq minutes pour être installés (hors temps éventuel de fixation à un mur ou de lestage du panneau).
- Quasi-absence de démarches administratives. Les panneaux classiques nécessitent plusieurs mois de démarche. Pas les kits, notamment parce que la vérification de conformité par l’organisme dédié (Consuel) n’est pas requise. Une simple déclaration auprès d’Enedis suffit.
- Réduction de la facture d’électricité. L’électricité produite est absorbée par les besoins du logement, réduisant le recours à l’électricité du réseau.
LES LIMITES
- Risques électriques en cas d’installation inadaptée. Un réseau électrique vétuste ou une multiplication des panneaux (plus de deux) branchés sur le même circuit de prises électriques exposent à des risques de surchauffe.
- Production limitée à une solution d’appoint. Leur puissance ne permet pas d’absorber les pics de consommation électrique du logement, d’autant que les moments de forte production (mi-journée) correspondent rarement aux moments de forte consommation (début de soirée).
Plein sud
Pour bien les exploiter, il faut pouvoir les placer dans de bonnes conditions : orientés plein sud et sur un espace dégagé, afin d’éviter toute ombre portée qui ferait chuter la production électrique. Bien sûr, climat oblige, les panneaux seront plus vite rentabilisés sur la Côte d’Azur que sur la Côte d’Opale… Mais quelle que soit la région, l’utilisateur peut optimiser la production en modifiant l’inclinaison des panneaux au fil des saisons. «Il faut chercher à s’approcher de la perpendiculaire par rapport aux rayons du soleil», explique Vincent Arrouet : l’angle idéal est de 20 degrés ou moins en été, contre 40 voire 50 degrés en hiver.

Une controverse sur leur sécurité
Ces solutions sont-elles trop parfaites ? Depuis quelques mois, le spectre d’une interdiction de ces kits plane. Les craintes se nourrissent d’un texte ultra-technique, la norme NF C15-100 portant sur les exigences applicables aux installations électriques en cas de construction ou de rénovation. Sa nouvelle version, en vigueur à partir d’août 2025, interdit de brancher les générateurs électriques sur une simple prise. Les kits solaires sont-ils concernés ? Les professionnels de l’électricité assurent que oui. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) soutient l’inverse : «Les kits solaires sont des installations amovibles, alors que le champ d’application de la norme se limite aux installations fixes», précise le syndicat qui, néanmoins, continue d’appeler à «une clarification réglementaire».
Derrière ces débats d’experts se cachent de réelles questions de sécurité. Installés sans précaution, ces kits exposent à des risques d’échauffement ou, pire, d’incendie. Ils doivent être branchés sur une prise électrique correctement reliée à la terre et protégée par un fusible de 16 ampères, voire 20 ampères selon les cas.
Et il faut bannir toute fantaisie. «On voit parfois des kits solaires branchés sur une rallonge électrique ou une multiprise», s’alarme Joël Mercy, président d’une association d’entraide entre particuliers, le Groupement des particuliers producteurs d’électricité photovoltaïque (GPPEP). Les incitations des vendeurs à multiplier les panneaux pour maximiser la production peuvent aussi occasionner des dérives. Certains en préconisent quatre, voire six. «Au-delà de deux panneaux de 500 watts, il est préférable de faire intervenir un électricien ou un installateur photovoltaïque», conseille Joël Mercy. Une liaison directe au tableau électrique, plutôt qu’un branchement sur une prise, s’avère nécessaire. Cela, bien sûr, pour éviter que les économies recherchées partent en fumée !
Ajouter une batterie : bonne ou mauvaise idée ?
Pour perfectionner l’installation, un nombre croissant de vendeurs de kits solaires proposent d’y adjoindre une batterie. Objectif : stocker l’éventuel surplus d’électricité produite aux heures de fort ensoleillement pour le restituer en soirée. Le coût, à ajouter à celui du ou des kits, est très variable selon la capacité de stockage : de 500 euros à plusieurs milliers d’euros. Cette tendance suscite le scepticisme de certains observateurs. «Avec les petits kits solaires, l’électricité est autoconsommée à 100% au moment où elle est produite», relève Joël Mercy, président du Groupement des particuliers producteurs d’électricité photovoltaïque (GPPEP). «Or, si l’on veut de la puissance, mieux vaut une vraie installation sur le toit que de multiplier les kits plug and play», ajoute Joël Mercy.
De son côté, l’Agence de la transition écologique (Ademe) met en doute la «pertinence environnementale» de l’ajout d’un stockage, dans un avis publié en janvier. Si l’opération permet de maximiser sa production électrique autoconsommée, c’est au prix d'« impacts environnementaux non négligeables» liés à la fabrication des batteries. Elles nécessitent de nombreuses ressources minérales et métalliques. L’Ademe préconise plutôt d’adapter ses habitudes de consommation, en décalant certains usages, comme la recharge de véhicules électriques, aux heures où les panneaux produisent le plus.
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