Dans un métier où l’on n’a pas l’admiration facile, il est considéré comme une légende vivante. A 73 ans, toujours accro au terrain, on le dit capable de débarquer à l’improviste dans l’un de ses 31 abattoirs ou débouler dans ses entrepôts de Rungis, dès 4 heures du matin, au volant de sa Porsche rutilante. Lui, c’est Jean-Paul Bigard, le grand maître de la bidoche, l’homme qui fait passer de vie à trépas la moitié des bovins et un bon quart des porcs dans notre pays. Un big boss à l’ancienne qui s’occupe encore de tout dans sa boîte de 15.000 personnes.

Il négocie les rachats de concurrents, valide les accords salariaux, contrôle la qualité d’un nouveau packaging. Parrain du secteur, il est accueilli avec déférence, chaque année, à la grand-messe annuelle du syndicat professionnel Culture Viande qu’il a présidé pendant près de vingt ans. C’est la seule apparition publique qu’il s’impose, car il n’aime pas la lumière. Fuyant les journalistes, il a logiquement refusé de rencontrer Capital et même interdit à ses collaborateurs d’échanger avec nous. Pas de quoi nous arrêter…

Cet étonnant Monsieur Bigard, à la tête d’un empire familial basé à Quimperlé (Finistère), serait-il gêné qu’on détaille son hégémonie ? Au rayon boucherie, c’est un ogre. Avec ses trois marques – Bigard la traditionnelle, Charal l’innovante et Socopa la conviviale – et ses gammes vendues sous logo U, Carrefour ou Auchan, il verrouille le marché. « Mis à part Coca et Ferrero, c’est le fournisseur le plus puissant que nous con­naissons », assure le responsable des achats de viande d’une des plus grosses enseignes françaises.

A lui seul, le groupe capterait 70% des ventes de steaks hachés, le débouché numéro 1 en grande distribution, poussé par la mode du burger. Mais ce n’est pas tout, le mastodonte alimente aussi des milliers de bouchers indépendants (8% de son business), de restaurants (13%) et d’industriels de l’alimentaire (16%).

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