Vous venez d’infliger une amende de 93 millions d’euros au gestionnaire d’actifs H2O. Un montant record ?

Marie-Anne Barbat-Layani : Oui, c’est l’amende la plus élevée qui ait jamais été prononcée dans l’histoire de l’AMF. Pour avoir un ordre de grandeur, le plafond maximum autorisé par nos textes est de 100 millions d’euros. Si nous sommes allés très au-delà des sanctions prises habituellement, c’est que nous avons découvert une situation de mauvaise gestion des fonds des investisseurs particulièrement grave.

Cette condamnation doit-elle aussi avoir valeur d’exemple ?

Il est en effet important de montrer aux individus au comportement déviant qu’ils ont en face d’eux une autorité forte n’hésitant pas à sanctionner, et à sanctionner durement si nécessaire. Cela me semble d’autant plus essentiel qu’on a longtemps considéré que les autorités françaises étaient moins sévères que leurs alter ego anglo-saxons. Or, la probité de la place de Paris est un élément clé pour son développement.

L’inflation – proche de 6% en France en 2022 – risque-t-elle de pousser certains investisseurs à prendre plus de risques pour compenser cette perte de pouvoir d’achat ?

C’est une crainte que nous avons, mais qui pour l’instant ne se matérialise pas. Notre Observatoire de l’épargne, paru en décembre dernier, montre que les Français ne sont pas prêts à prendre plus de risque pour essayer, entre guillemets, de se refaire. Maintenant, il faut rester vigilant, car une partie de la population, notamment chez les plus jeunes, peut se laisser séduire par des offres présentant un risque très élevé.

D’autant que les «boursicoteurs» sont de plus en plus jeunes…

Nous avons effectivement observé un net regain d’intérêt chez les jeunes adultes. Nos dernières enquêtes montrent ainsi que l’âge moyen de l’investisseur boursier est tombé pour la toute première fois sous la barre des 50 ans. Une bonne nouvelle: sur le moyen-long terme, le placement en actions reste l’investissement le plus intéressant pour se constituer une épargne. Et ce rajeunissement se confirme malgré le recul des valeurs boursières ces derniers mois.

Comment expliquez-vous ce phénomène?

Cet appétit des jeunes générations pour une forme de prise de risque a été porté par les offres innovantes des nouveaux courtiers en ligne, qui avec des applications simples et ludiques ont su rendre l’investissement en Bourse plus accessible et désirable. Mais ce public est-il pleinement conscient des risques qu’il prend, en particulier quand il investit dans les cryptomonnaies, un univers où il n’y a aucune protection? Je n’en suis pas du tout certaine. Je pense d’ailleurs qu’un certain nombre de nos compatriotes ont perdu beaucoup d’argent avec la faillite récente de la plateforme FTX, qui n’était pas, je le rappelle, enregistrée à l’AMF. Pour toucher ce nouveau public, nous avons donc adapté notre communication, avec des vidéos sur YouTube, TikTok…

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