
Et si un crossover façon «shooting brake» (break de chasse), haut de gamme et écolo, signait le futur de Renault ? Au Mondial de l’auto, au mois d’octobre dernier, la marque avait laissé quelques indices quant à cette énigme, par la présentation notamment d’un concept-car nommé Emblème. Problème, on n’y prêtait guère attention, ainsi posé au fond du stand, derrière les stars R5 E-Tech et R4 électrique. Pourtant, ce modèle à batterie passé inaperçu demeure bien la préfiguration de ce à quoi pourraient ressembler les futures voitures de Renault. Celles qui incarneront ses ambitions en matière de décarbonation. Définition de ce mot barbare : il s’agit d’un ensemble d’actions, de mesures et de techniques visant à réduire la consommation d’énergies fossiles et l’émission de dioxyde de carbone d’un pays, d’une économie ou d’une entreprise, selon le Larousse. Enjeu énorme aujourd’hui pour tout constructeur automobile qui se respecte. En effet, le concept-car Emblème émettrait ainsi 90% de gaz à effet de serre en moins, en comparaison d’un véhicule référence de 2019 et encore produit aujourd’hui. Soit seulement 5 tonnes de CO2 émis du «berceau à la tombe», c’est-à-dire de sa conception jusqu’à sa fin de vie. Tout se mesure, l’extraction des matières premières, la production des composants, en passant par leur assemblage, le transport, l’usage du véhicule, son entretien et son recyclage. Renault nous a expliqué comment il a fait pour concevoir ce laboratoire sur roues, doté d’une cinquantaine d’innovations.
Renault et cette chasse au poids emblématique !
Réduire l’empreinte carbone passe déjà par le design. Oubliez tout ce que vous savez sur les Renault, Emblème s’affiche comme un break de chasse futuriste de 4,8 mètres, aux lignes tendues et aérodynamiques (pénétration de la voiture dans l’air) permettant ainsi d’émettre moins de CO2. Loin du gabarit «SUV», ce concept-car assume une silhouette basse et élancée, dépourvu de rétroviseurs, remplacés par deux caméras intégrées dans les arches de roues. Les essuie-glaces avant sont même cachés sous le capot, et les poignées de porte sont sensibles au toucher de la main et creusées dans la carrosserie.

Pour tenir l’objectif durable, les designers et les ingénieurs se sont penchés sur la question du poids, l’ennemi juré de la consommation d’énergie. Ainsi, tous ont fait la chasse au kilo superflu pour mettre sur roues une voiture pesant au total 1 750 kg, batteries comprises. Une masse plus faible que la plupart des véhicules électrifiés. Une vingtaine d’industriels comme Michelin, Valeo, etc, y ont aidé, en jouant le jeu, même devant un cahier des charges strict en matière de décarbonation. Forvia a par exemple fourni pour ce concept, 5 éléments (console centrale, panneaux de portes, la planche de bord, etc). Grâce à l’utilisation de fibre de chanvre ou de feuille d’ananas, en évitant la soudure ou la colle (par emboîtement), l'équipementier a réduit le poids embarqué de ces modules de 5 kg et ses émissions de CO2 de 72%. Verkor, fabricant et fournisseur français de batteries, s’est engagé à réduire de 72% ses émissions carbone par rapport à ce qui est commercialisé sur le marché, et ce, grâce à des batteries de nouvelle génération, plus petites et moins lourdes, mais tout aussi performantes. Cette quête du kilo s’incarne également par l'intermédiaire du producteur d’acier Acelor Mittal, qui a notamment réduit l’épaisseur de ses éléments pour alléger le véhicule de 40 kg sans impacter la sécurité, du groupe Constellium pour l’utilisation d’aluminium issu de chutes, du fournisseur Discatal pour son choix de jantes en plastique recyclé, etc. Notons qu’Autoneum a allégé le poids du tapis de sol de 7kg en n’utilisant qu’une seule matière, le polyester, à 90% recyclé à partir de particules de verre. Emblème est conçu avec 50% de matériaux recyclés, et ses éléments sont à 90% recyclables.

Un Renault Emblème à hydrogène ! À quel prix et pour quand ?
Ce projet d’auto verte comprend aussi une surprise sous le capot. Emblème dispose d’une motorisation électrique bi-énergie. Le concept-car est ainsi alimenté de deux manières : par une batterie rechargeable «classique» de 40 kWh, moins lourde, plus vertueuse, suffisante pour les trajets du quotidien et par une pile à combustible à hydrogène bas carbone de 30 kW, qui prend le relais sur les longues distances. Aucun bouton n’a été installé aux commandes, la transition est automatique. L’autonomie totale peut donc atteindre jusqu’à 1 000 km avec seulement deux arrêts de cinq minutes pour faire le plein d’hydrogène.
C’est bien beau tout ça, mais le défi est grand. Alors à quand des voitures de type Emblème produites en grande série, et en vente ? Si vous êtes conquis, il faudra vous montrer patient. Et ce n’est même pas pour une question de prix que Renault hésite, puisque tous les acteurs promettent de concert que ce véhicule durable ne sera pas plus cher à l’achat pour le consommateur final s’il est commercialisé un jour. Grâce notamment à une filière organisée et des délais d’investissements respectés et optimisés par tout le monde.
Si quelques éléments de design extérieur et intérieur pourront éventuellement se retrouver d'ici à 3 ans dans les futurs modèles Renault, c’est la viabilité du projet avec l’hydrogène qui reste compromise. La seule motorisation électrique rendrait possible le projet mais il faudrait revoir légèrement les objectifs de C02 à la baisse. Renault se dit prêt à travailler le sujet hydrogène en profondeur, mais la France, non, car le réseau de distribution reste encore bien trop embryonnaire à date. On nous dit dans l’oreillette que le grand patron Luca de Meo “voudrait le sortir rapidement”, peut-être en version électrique, à moins de -50 g de CO2 émis et non -90g, permis par l’ajout de la technologie hydrogène.
Reste à savoir aussi si cette audace séduira les conducteurs et marquera le début d’une nouvelle ère pour Renault.
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