«Pendant des décennies, notre pays a été pillé, saccagé, violé et dévasté par des nations proches et lointaines, alliées comme ennemies», a affirmé Donald Trump depuis la roseraie de la Maison Blanche, où le président américain a pris la parole pour déclarer «l’indépendance économique» des Etats-Unis. Le 2 avril 2025 «restera à jamais dans les mémoires comme le jour où l’industrie américaine a ressuscité», a garanti le milliardaire. Le «Liberation Day», prévu depuis déjà quelques semaines, restera en effet dans les mémoires tant il a secoué tous les acteurs du commerce international.

Donald Trump a annoncé imposer dès le 5 avril un droit de douane additionnel de 10 points de pourcentage pour toutes les marchandises entrant aux Etats-Unis. Puis, à compter du 9 avril, de nombreux pays seront visés par des surtaxes, calculées par l’administration américaine. 34% pour la Chine, 46% pour le Vietnam, 24% pour le Japon, 26% pour l’Inde, 31% pour la Suisse et 20% pour l’Union européenne. Ces droits de douane s’ajoutent à ceux déjà en vigueur avant le début du second mandat de Donald Trump.

Et gare à ceux qui voudraient se rebeller, le secrétaire au Trésor américain a conseillé «à tous les pays de ne pas riposter». «Détendez-vous, encaissez le coup, et attendez de voir comment la situation évolue. Car si vous ripostez, il y aura une escalade», a prévenu Scott Bessent.

L’Union européenne veut d’abord négocier avec l’administration américaine

L’augmentation des droits de douane est une «immense difficulté» pour l’Europe, a déclaré jeudi 3 avril François Bayrou, pour qui il s’agit également d’une «catastrophe pour les Etats-Unis». En France, la riposte s’organise déjà : l’Elysée a convoqué à 16 heures les «représentants des filières impactées par les mesures tarifaires annoncées par les Etats-Unis», soit l’aéronautique, l’industrie et la chimie, l'agriculture et la viticulture mais aussi la pharmacie, le luxe, les organisations patronales ou encore l’automobile.

Du côté de l’Union européenne, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, l'a reconnu, ces annonces sont «un coup dur» pour l’économie mondiale. Elle a dit regretter «profondément» cette décision et a affirmé que les Européens étaient «prêts à réagir» et travaillaient déjà à «un nouveau paquet de contre-mesures» s’il était impossible de négocier avec l’administration américaine. Car l’Union européenne insiste : il n’est «pas trop tard» pour trouver un accord avec les Américains.

L’Italie veut elle aussi «parvenir à un accord avec les Etats-Unis, afin d’éviter une guerre commerciale qui affaiblit inévitablement l’Occident au profit d’autres acteurs mondiaux», a assuré la première ministre, Giorgia Meloni. Outre-Rhin, le chancelier allemand, Olaf Scholz a certifié que l’Europe répondra «de manière unie, forte et appropriée» et s’est dit «à la disposition du gouvernement américain pour discuter et éviter une guerre commerciale».

L’Union européenne est «prête pour cette guerre commerciale» et réfléchit à des contre-mesures

L'Irlande, où sont basés les sièges européens des grands groupes américains de la tech et du secteur pharmaceutique, attend de l’Union européenne une réaction «proportionnée». Le pays présente le plus important excédent commercial de l’UE avec les Etats-Unis. En cas d’échec des négociations, les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) pourraient bien devenir un moyen de pression, a dévoilé la porte-parole du gouvernement français. «Nous essaierons d’abord de négocier avec les Etats-Unis, mais nous avons deux ripostes, car Monsieur Trump ne comprend que le rapport de force», a présenté Sophie Primas, ce jeudi au micro de RTL, qui a affirmé que l’UE était «prête pour cette guerre commerciale».

La première de ces contre-mesures pourrait être prête dès la «mi-avril» et «répondra à la première attaque américaine sur l’aluminium et l’acier». Le président américain a annoncé mi-mars la mise en place de droits de douane de 25% sur l’acier et l'aluminium en provenance du monde entier alors que le secteur sidérurgique en Europe est déjà fragilisé. La seconde réponse européenne devrait être «prête à la fin du mois d’avril et concerne l’ensemble des biens et services américains», a ajouté la porte-parole du gouvernement de François Bayrou.

Les produits qui seront concernés «ne sont pas encore considérés» car ils doivent être déterminés à l’échelle européenne. Premier indice, les «services numériques, les Gafam» pourraient bien faire partie de cette liste aux côtés de «l’accès aux marchés publics». A Berlin, Robert Habeck, le vice-chancelier allemand, ministre de l’économie et du climat allemand a lui aussi laissé sous-entendre l’idée d’un impôt européen sur la «tech» américaine. «Tout est sur la table», a-t-il indiqué avant de nuancer : il faut «faire attention à ne pas rendre plus cher les produits dont on a besoin soi-même et que l’on ne peut pas compenser par d’autres pays».

Ailleurs dans le monde, l’heure est tout aussi grave. Si le Royaume-Uni demande de «rester calme» et a annoncé ne pas riposter immédiatement, la Chine a ordonné à l’administration américaine d'«annuler immédiatement» ces surtaxes et s’est dite ouverte au dialogue. Il faut dire que les annonces du Jour de la Libération de Donald Trump se cumulent avec les 20% déjà mis en place à l’arrivée du président à la Maison Blanche, ce qui fait grimper les taxes douanières à 54% pour la Chine. Quant au Japon, le gouvernement pense que les Etats-Unis pourraient avoir enfreint les règles de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) et leur accord bilatéral.