C’est une étape décisive dans un dossier hors norme. Le juge d’instruction en charge de l’enquête sur les «biens mal acquis» de la famille Bongo a annoncé, le 4 avril 2025, la clôture de cette procédure ouverte en 2010 à Paris, comme l’a révélé l’AFP. Vingt-quatre personnes sont mises en examen : onze enfants du défunt président Omar Bongo, la BNP Paribas, un notaire, un avocat, ainsi que l’ex-Miss France Sonia Rolland. L’un des mis en cause est décédé depuis.

La justice s’intéresse à un patrimoine immobilier considérable — évalué jusqu’à 85 millions d’euros — qui aurait été acquis via des détournements de fonds publics gabonais. Des biens de prestige situés à Paris, en Provence ou sur la Côte d’Azur ont été saisis à hauteur de 70 millions d’euros, selon une source judiciaire. En arrière-plan, l’affaire éclaire les mécanismes d’un système d’enrichissement illégal, nourri par les liens troubles entre la France et ses anciennes colonies africaines.

Des figures politiques et financières dans le viseur

Le président déchu Ali Bongo Ondimba, renversé par un coup d’État militaire en août 2023, n’est pas mis en examen à ce stade, mais son nom revient régulièrement dans l’enquête. Son immunité présidentielle l’a jusqu’ici protégé, mais le changement de régime pourrait modifier la donne.

La banque BNP Paribas a été mise en examen en août 2021 pour blanchiment aggravé, soupçonnée d’avoir facilité des mouvements de fonds suspects pour un montant estimé à 35 millions d’euros. Sonia Rolland, Miss France 2000, est poursuivie pour recel : elle avait reçu un appartement parisien de la part d’Édith Bongo, épouse d’Omar Bongo, sans s’interroger sur l’origine du bien.

Une décision attendue du parquet national financier

C’est désormais au parquet national financier de rendre ses réquisitions, qu’il s’agisse d’un classement sans suite ou d’un renvoi devant le tribunal correctionnel. Le juge d’instruction statuera ensuite sur la tenue éventuelle d’un procès. Un tel procès pourrait constituer un moment fort dans la lutte contre les avoirs illicites d’origine étrangère présents en France.

Ce dossier s’inscrit dans une série d’enquêtes visant les fortunes controversées de dirigeants africains, notamment en Afrique centrale. De nombreuses ONG anticorruption y voient un test pour la volonté réelle de la France de restituer les biens mal acquis à leurs pays d’origine.