
«On a senti qu’une partie de la classe politique voulait faire de nous des boucs émissaires.» A l’évocation des derniers mois, le patron de l’entreprise Redex, Bruno Grandjean, ne cache pas sa colère auprès du Parisien alors que les patrons sont de plus en plus pris pour cible. Il fait partie des 300 chefs d’entreprise (TPE, PME et ETI) à avoir signé la tribune dans L’Express «Trop c’est trop» où ils dénonçaient les dérives budgétaires. Au-delà du collectif qui réunit désormais plus de 2 000 patrons, c’est l’incertitude qui prédomine ainsi que de possibles nouvelles taxes. Face à ce contexte, de nombreux patrons décident donc de quitter la France.
C’est ce qu’explique à nos confrères l’Association française des entreprises privées (Afep), précisant que beaucoup préfèrent désormais «investir plus en changeant de résidence fiscale». Un «cercle vicieux» dénoncé par l’Afep, car comme la rentabilité est moindre en France, ils investissent moins et le «dynamisme» du pays en prend un coup. Selon une source du Parisien au Medef, «les départs s’accélèrent» ces derniers mois. Si on n’en est pas encore au stade de l’hémorragie, la dissolution de l’Assemblée nationale a été l’élément déclencheur.
Des régimes avantageux en Italie, Espagne et Portugal
Qui décide de partir ? Selon nos confrères, il s’agit essentiellement de chefs d’entreprise de TPE-PME dans des secteurs comme le conseil, l’architecture, le digital, l’ITT ou le négoce. Tous partent vers des pays où le soleil règne, avec leur famille, afin de trouver, d’une part, une meilleure qualité de vie, et d’autre part, une politique fiscale plus attractive. Et ils ne partent pas forcément loin. Parmi les destinations attractives, on retrouve le Portugal qui propose un programme d’incitation fiscale pour les patrons avec «un impôt sur le revenu à 20% contre 45%», explique l’avocat spécialisé en droit du travail du cabinet CHG-Avocat, Me Gauthier-Chevalier.
Ce dernier explique d’ailleurs au Parisien qu’il reçoit entre 200 et 300 nouveaux dossiers chaque mois de demandes d’informations de chefs d’entreprise qui veulent quitter le pays, soit «30% à 35% de hausse». Selon lui, 15% des dossiers se concrétisent. En dehors du Portugal, l’Espagne séduit aussi grâce à son impôt sur le revenu limité à 24% jusqu’à 600 000 euros. Sans oublier l’Italie qui vient de mettre en place une flat tax : les patrons doivent en effet payer un forfait annuel de 200 000 euros d’impôts chaque année sur les revenus de source étrangère, et peu importe le montant !
Le risque de l’«exit tax»
Enfin, il y a Dubaï, décrit comme l’«eldorado» par nos confrères. Si le niveau de vie y est plus élevé, il n’y a quasiment aucun impôt et cotisation sociale. Il faut cependant faire attention à l’«exit tax», met en garde Me Gauthier-Chevalier. Spécialiste en droit du travail international au sein du cabinet TF Associés, Me Franck Teya explique avoir reçu depuis septembre une cinquantaine de demandes, principalement des «patrons de PME dépassés par les taxes». Mais tous ne veulent pas céder aux sirènes du départ. Bruno Grandjean veut, lui, se battre et «exprimer son mécontentement» jusqu’en 2027. S’il n’est pas entendu, il «verra»…




















