Grosse différence de salaire dans le couple : les comptes de Joëlle et Christophe passés en revue

Nous sommes mariés depuis 24 ans, sans contrat de mariage donc tout ce que nous acquérons depuis nous appartient pour moitié. À la banque, nous avons deux comptes communs mais nous nous en servons comme compte personnel. Christophe ne touche pas au compte qui reçoit mon salaire et inversement, d'ailleurs je n'étais pas au courant de la somme qu'il y avait ! C'est sur son compte que tombent les loyers des appartements ».

Pas de prorata. « C'est Christophe qui gère les finances. De mon côté, je gère mon compte, mon épargne et les dépenses plutôt liées au quotidien comme les courses et c’est tout, je ne jette jamais un œil sur le reste. Je ne regarde pas les prix, je privilégie la qualité privilégiant les magasins bio. Quand nous devons faire un cadeau, c'est moi qui paye. Christophe s’occupe des grosses dépenses comme les assurances, les charges des appartements et les quelques sorties au restaurant. En fait, on ne tient pas vraiment de comptes. Nous sommes assez fluide sur le sujet de l'argent et cela fonctionne comme ça».

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Mode fourmi. «Nous faisons très attention à ce que nous dépensons. Je viens d'un milieu plus modeste que Christophe. En fait, je fais comme mes parents que j'ai vu épargner toute leur vie. Nous n'avons jamais emprunté à la banque. Nous ne voulons surtout pas être dans le besoin, ne pas être pris au dépourvu. Par contre, on arrive quand même à se faire plaisir en vacances, entre deux et trois semaines par an.

En vrai, nous n’avons pas trop le temps de profiter de notre argent. Nous pourrions sortir le soir mais Christophe travaille tard, est en déplacement une semaine sur deux et travaille aussi le week-end. Parfois, je sors un peu avec mes amies. En fait, nous sommes condamnés à épargner. C'est paradoxal. C'est comme si nous ne pouvions faire que ça de notre argent. Après, cet argent nous donne aussi la liberté de quitter un emploi n'importe quand. C’est aussi pour cela que nous ne restons jamais longtemps en poste».

Défiscaliser et investir. «Nous nous posons la question d'acheter de nouveau un appartement pour investir, mais nous attendions de voir le montant des frais de succession suite au décès de ma mère. Pour Christophe, l'immobilier est vraiment une valeur sûre. D'ailleurs, il envisage de faire un don d'un de nos appartements aux enfants et d’en garder l'usufruit. Christophe se pose la question de comment défiscaliser pour éventuellement partir plus tôt en retraite. Nous avons aussi la crainte d'être imposés sur la fortune. Avec la valeur de nos biens, mon héritage et notre fils qui va bientôt partir, nous allons payer plus d'impôts.

De mon côté, je me suis arrêtée quelques années pour m'occuper de mes enfants quand ils étaient plus petits donc il me manque des trimestres. Je me pose la question de savoir comment orienter mon épargne pour compenser. Sachant que Christophe est plutôt du genre cadre stressé avec la vie pas très saine qui va avec. J'ai peur, on ne sait jamais ce qu'il va se passer dans la vie. Lui me dit ‘ça ira avec les loyers des appartements’. En cas de séparation, nous n'en avons jamais parlé mais nous ferons plus ou moins moitié/moitié, l'essentiel étant que tout reste aux enfants».

Epargner, oui mais pas trop. «Je mets de côté 200 euros par mois sur une assurance-vie. Montant que j'ai baissé car le sujet mérite réflexion. Depuis le décès de ma mère, je préfère avoir de l'argent disponible car nous avons payé 120 000 euros de frais de succession, sans compter les frais de fin de vie. D'ailleurs, son contrat à elle n'était pas intéressant, ils prélevaient beaucoup, avec des tas de subtilités. De son côté, Christophe n'a pas trop confiance dans son assurance-vie, il l'a ouverte il y a un an environ».

3/ Les conseils de la coach financière

«Joëlle et Christophe font face à une problématique plus fréquente qu’on ne le pense : ils se sentent "condamnés à épargner" et n’ont "pas le temps de profiter de leur argent". Leurs revenus d’activité sont très différents (elle gagne un tiers des revenus du couple), mais leur gestion, leur patrimoine et leurs charges sont administrés en commun, ce qui est un exemple type du "sans contrat de mariage" (c’est-à-dire "la communauté réduite aux acquêts"). Pas de comptes courants perso donc, mais une jolie solution qui consiste à avoir chacun un compte commun, ainsi chacun a sa propre relation à l’argent et à la gestion, tout en gardant l’esprit d’un argent commun.

Comme souvent, c’est Joëlle qui se charge du quotidien et des petites dépenses, Christophe de l’exceptionnel et des grosses dépenses. Malgré une situation qui peut sembler confortable, Joëlle confie qu’ils se sentent "condamnés à épargner", qu’ils craignent d’être "pris au dépourvu", n’ont pas le temps de profiter de leur argent, et "on ne sait jamais ce qu’il peut arriver dans la vie". Voici mes pistes d’amélioration pour Joëlle et Christophe.

• Conseil 1 → Parler du futur, de leurs projets et "affecter leur argent"

L’argent est un outil que nous utilisons pour nourrir nos besoins, construire des projets, mais il n’a pas le pouvoir de nous rassurer. La démarche d’épargne de Christophe et Joëlle semble être plus automatique (culturelle, familiale) que liée à des projets. Preuve en est : cette épargne ne les rassure pas sur leur avenir et les contraint. L’argent qui n’est pas affecté (dirigé vers un projet) reste un peu comme un poids mort qui est voué à être là "au cas où". Or, ce "cas où" reste flou et parfois menaçant, car c’est de l’argent utilisé inconsciemment pour rassurer une peur : il peut selon les personnes devenir intouchable (et bloqué) ou au contraire fondre à mesure qu’il est mis de côté, pour faire face à d’autres achats plus "réels" que l’obligation d’épargner ou la peur d’être pris au dépourvu.

Je recommande toujours de définir l’utilisation de l’argent épargné   que ce soit par exemple pour les études des enfants, pour un premier apport dans le cas d’un achat immobilier, ou même dans la gestion quotidienne pour faire face aux "imprévus prévisibles" (remplacement du chauffe-eau, réparations de la voiture etc.). Ainsi, il y a une dynamique tournée vers l’avenir et l’argent prend sa place d’énergie mise dans un projet.

• Conseil 2 → Se faire accompagner

Les solutions qui sont évoquées (investissement pour défiscaliser) semblent davantage être des solutions techniques que des projets. Or, entre les lignes, il apparaît un désir de partir plus tôt en retraite pour tous les deux, de vivre plus sereinement et le projet de transmettre à leurs enfants : ce couple aurait avantage à se faire accompagner pour préciser ses objectifs et définir une stratégie patrimoniale, qui prendrait en considération fiscalité et héritage.

Parler d’avenir sera aussi l’opportunité pour eux d’échanger sur leurs craintes, avec cette question par exemple : si l’épargne et l’investissement ne sont pas un but "en soi", quels sont nos projets et comment voulons nous vivre d’ici 10, 20, 30 ans ? Ils peuvent parler de tout cela à leur banquier, à un conseiller de gestion de patrimoine ou à leur notaire.

• Conseil 3 → Palier aux inquiétudes de Joëlle

Si Joëlle a l’objectif de se rassurer quant à son train de vie au moment de sa retraite, elle pourrait envisager de se constituer sa propre épargne retraite et/ou racheter des trimestres manquants. Dans les deux cas, c’est très défiscalisant _ une autre de leur préoccupation _, puisque tout ce qui est versé pour racheter des trimestres est intégralement déduit du revenu imposable, de même que les cotisations versées (dans une certaine limite) sur un plan d’épargne retraite.