
Le gouvernement n’en démord pas. Invitée de la matinale de RMC le 23 juillet, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, est venue préciser la feuille de route du gouvernement pour dénicher les quelque 43,8 milliards d’euros d’économies souhaités par François Bayrou. Dans le viseur : les arrêts maladie, qui ont «augmenté de 40% depuis 2019», a-t-elle souligné. Si elle admet que la moitié est due au vieillissement des actifs, «35% de cette hausse est liée à une augmentation des taux de recours, tous âges confondus et en particulier des jeunes», a précisé la ministre. Montant total de l’ardoise : 16,9 milliards d’euros d’indemnités journalières versées en 2024 pour les arrêts maladie, accidents du travail et maladie professionnelle, selon la Mutualité française.
Pour réduire la facture de l’Assurance maladie, la ministre en appelle donc à la «responsabilité individuelle», raison pour laquelle «[le gouvernement] parle aussi d’un jour de carence d’ordre public». Concrètement, le premier jour d’arrêt pourrait ne plus être indemnisé, tant par l’employeur que par la Sécu. Aujourd’hui, la Sécurité sociale applique déjà un délai de carence de trois jours. Mais la majorité des salariés du privé ne le subissent pas vraiment. Comme le rappelle un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) publié en juillet 2024, «deux tiers [des salariés du privé, NDLR] sont protégés contre la perte de revenu induite par le délai de carence par le biais de la prévoyance d’entreprise». Dans la plupart des cas, les accords collectifs garantissent donc une indemnisation dès le premier jour d’arrêt maladie.
Le premier jour d’arrêt maladie «ne serait indemnisé par personne»
Mais tout cela pourrait vite changer, puisque le ministère du Travail souhaite instaurer ce fameux jour de carence obligatoire pour tous les salariés du privé, «où le premier jour ne serait indemnisé par personne», a-t-elle résumé. Ce qui se traduirait purement et simplement par un jour d’indemnités journalières en moins, à l’image de ce qu’il se fait déjà dans la fonction publique. Une initiative logiquement soutenue par le Medef. Dans ses propositions formulées le 9 juillet, le syndicat patronal allait même plus loin que la ministre, évoquant l’idée d’«instaurer un ou plusieurs jours de carence d’ordre public». Auprès de Capital, le Medef prétexte toutefois que l’enjeu n’est pas uniquement financier : «Ces jours de carence visent davantage à modifier les comportements, car une absence pèse lourd dans l’organisation des entreprises, particulièrement des plus petites.»
La volonté de modifier ces comportements ne date pas d’hier. Déjà, en novembre 2024, Yannick Neuder, alors rapporteur général du budget de la Sécu qui allait devenir quelques semaines plus tard ministre de la Santé, appelait dans une tribune au JDD à «un débat sur le jour de carence d’ordre public pour rétablir l’égalité public-privé». De quoi faire bondir les syndicats de travailleurs. Interrogé par Capital, Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT, rappelle que «le rôle de la Sécurité sociale est précisément d’assurer un revenu de remplacement pour que la maladie ou la maternité ne soit pas, en plus, synonyme d’insécurité».



















