Le conclave sur la réforme des retraites entre partenaires sociaux doit-il encore se tenir ? Edouard Philippe semble contre. Dans un entretien accordé au Figaro, l'ancien Premier ministre n'a pas été tendre avec François Bayrou. «Très franchement, je trouve que ce 'conclave' est complètement hors-sol. Je m'étonne qu'il existe encore» au regard des changements géopolitiques et de l'effort de défense qui doit être produit, a déclaré l'ancien Premier ministre.

«Il a été imaginé pour stabiliser la situation politique au moment du vote du budget. Très bien. Mais on laisse dans l'atmosphère l'idée qu'on pourrait revenir sur la réforme Borne. La vérité, c'est que compte tenu des menaces, on ferait bien de réunir les forces sociales et politiques, non pas pour leur demander s'il faut revenir sur une réforme déjà votée, mais pour se demander comment s'adapter à un effort à venir considérable, presque existentiel», a développé Edouard Philippe.

Vers un nouveau mandat au Havre ?

Lors de sa déclaration de politique générale en janvier, François Bayrou a annoncé la tenue d'un «conclave» entre syndicats et patronat pour réviser la controversée réforme de 2023, qui a porté l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans. Ces concertations ont débuté le 27 février. Le syndicat FO a claqué la porte d'emblée. Syndicats et patronat sont censés se réunir chaque jeudi au moins jusqu'à la fin du mois de mai. François Bayrou s'est engagé à soumettre un éventuel accord, même partiel, à l'appréciation du parlement.

Par ailleurs, Edouard Philippe indique qu'il présentera son programme pour l'élection présidentielle «à partir de mai 2026», «après les municipales» de mars 2026 lors desquelles il sollicitera un nouveau mandat à la mairie du Havre. «Je proposerai un nouveau système de retraites, qui conservera un niveau de solidarité important, mais qui devra équilibrer son financement sans recourir à la dette publique. Par ailleurs, faire reposer le régime des retraites exclusivement sur la répartition est devenu un non-sens. Notre démographie condamne le système actuel», explique notamment le maire du Havre.

Un système reposant sur trois régimes

«Enfin, je suis convaincu que sans aller jusqu'à un régime universel, un système de retraite qui reposerait sur trois régimes - un pour les salariés du privé, un pour les agents du public, un pour les indépendants - serait infiniment plus fluide, plus clair et plus juste. Vous avez compris que je proposerai une réforme d'ampleur», ajoute-t-il, sans évoquer explicitement le décalage de l'âge de départ à 65, 66 ou 67 ans, comme il l'avait préconisé en 2021. Edouard Philippe explique aussi vouloir imposer «une 'règle d'or'» qui «contraindrait à revenir à un équilibre financier en dix ans».

Le président du parti Horizons, qui réunit ses troupes dimanche à Lille, réitère sa critique d'une absence de réformes substantielles. «J'ai vu le programme de travail proposé par le Premier ministre aux parlementaires. Je ne crois pas qu'il soit marqué par une densité exceptionnelle», dit-il au Figaro, multipliant les piques à l'égard de François Bayrou.

«Travailler plus» pour préserver le modèle social

«Nous vivons dans un monde qui change vite et notre pays semble frappé par une espèce d'immobilité. Je ne dis pas que ce que fait le gouvernement est sans intérêt, et je connais la situation politique, mais je regrette qu'aucune réforme d'ampleur ne soit préparée. Au moment où l'Otan se fissure et où le multilatéralisme s'écroule, consacrer notre énergie à évoquer le mode de scrutin à Lyon, Marseille et Paris me paraît curieux. Baroque même», insiste Edouard Philippe.

Enfin l'ancien Premier ministre a jugé que pour être «en mesure de défendre ce que nous sommes, notre liberté, notre modèle démocratique et social», il faudra sans doute «travailler plus». «Travailler plus dans la semaine, ou dans l’année. À 28 ans ou à 40 ans, on peut sans doute travailler plus qu’à 60. Cela voudra dire aussi travailler plus longtemps dans la vie», a-t-il indiqué au Figaro.