Emmanuel Macron a accéléré le tempo. Lors de son discours aux armées, samedi 13 juillet, le président de la République a annoncé une hausse du budget de la défense : 6,5 milliards d’euros supplémentaires d'ici 2027, avec pour objectif d'atteindre 64 milliards par an dès cette date, contre 47 milliards aujourd'hui. Soit un effort budgétaire avancé de trois ans par rapport à la loi de programmation militaire 2024–2030. Pour le chef de l'État, la menace est claire : si la Russie triomphe en Ukraine, «ce sera une défaite pour l’Europe». L'exécutif entend aussi relancer la dynamique de recrutement. Alors que la réserve militaire compte aujourd’hui 45 000 volontaires, Emmanuel Macron veut «beaucoup plus de femmes et d’hommes formés» et une nouvelle version du SNU (service national universel).

Mais pour de nombreux experts, l’urgence est ailleurs. Interrogé sur BFMTV, Patrick Dutartre, général de l'armée de l'air, ancien leader de la Patrouille de France, constate : «on n'a pas assez de munitions. Ni assez d’hommes». Selon lui, «nous sommes, en France, des acteurs de la défense et des acteurs de la paix. Malheureusement nous avons désossé nos armées. Il faut être réaliste : si on veut être entendu, en France, en Europe et dans le monde, il faut avoir les moyens de sa politique. C'est une affaire d'argent, mais aussi de choix et de priorités». Si l'armée française reste l'une des plus avancées technologiquement, elle souffre donc d'un déficit capacitaire structurel. L’armée de l’air ne compte par exemple que 109 avions Rafalequand il en faudrait 300, déplore Patrick Dutartre.

Une armée encore trop «échantillonnaire»

Derrière les milliards annoncés, le défi est aussi organisationnel. Le général Dutartre appelle à une refonte de la chaîne de commandement : «Il faudrait une unité bis voire ter à chaque unité. Il faut être pragmatique, on est trop lourds en organisation.» Plus d’autonomie laissée aux chefs d’unité, plus de souplesse dans la formation des réserves, et surtout une vision réaliste : «On ne peut pas être partout, prévient-il, l'armée française est remarquable, au top de la technologie quasiment dans tous les secteurs, mais on est échantillonnaire.»

Alors que la Russie intensifie ses assauts contre l'Ukraine, l'Europe et la France n'ont plus vraiment le luxe d’attendre. Comme le rappelait le journaliste Anthony Lebbos sur BFMTV à la veille de la prise de parole d'Emmanuel Macron, la France «s'est fixé un objectif d'ici à 2030 d'atteindre 3,5% du PIB pour ce qui est du budget de la défense. On est actuellement à 2%. Ce sera l'un des seuls postes budgétaires qui ne sera pas coupé par François Bayrou». Le Premier ministre a d'ailleurs lui-même déclaré que ce budget était «sacré».