Le «Liberation Day» de Donald Trump a fait des dégâts. Mercredi 2 avril, le président américain a annoncé une nouvelle vague d’augmentation des droits de douane, notamment de 20% pour les marchandises en provenance de l'Union européenne (UE). Il a également évoqué un droit de douane plancher, d'au moins 10%, sur tous les produits exportés aux Etats-Unis. Ces nouvelles mesures entreront en vigueur les 5 et 9 avril et s’additionnent aux taux déjà appliqués avant même le retour du milliardaire américain à la Maison Blanche.

Jeudi 3 avril, en clôture, les bourses européennes ont fortement chuté, Paris signant sa plus forte baisse depuis deux ans. Pour certains secteurs, comme les vins et spiritueux, très présents sur le marché américain, les annonces de Donald Trump ont fait l’effet d’une bombe. La fédération des vins et spiritueux (FEVS) table sur un «recul des exportations d’environ 800 millions d’euros», a-t-elle précisé dans un communiqué.

Un impact «massif» et qui touchera «tous les secteurs»

La hausse des taxes douanières est une «immense difficulté» pour l’Europe, a affirmé François Bayrou, jeudi. Pour Emmanuel Macron, il s’agit d’une «décision brutale et infondée». Le président de la République a pris la parole lors d’une réunion organisée jeudi après-midi à l’Elysée avec les représentants des filières économiques «les plus impactées» par la guerre commerciale déclenchée par l'administration Trump et quelques membres du gouvernement français. «L’impact des droits de douane américains sera massif et touchera tous les secteurs», a mis en garde le chef de l'Etat qui a rappelé que les exportations vers les Etats-Unis représentent 1,5% du PIB français.

«La France répondra à l’échelle européenne», a précisé jeudi matin la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas. Si l’Union européenne veut d’abord négocier avec les Etats-Unis pour obtenir la suppression des mesures, les pays membres de l’UE réfléchissent déjà à des propositions de riposte. En attendant que la situation soit «clarifiée», Emmanuel Macron a appelé les entreprises françaises ayant des «investissements à venir ou annoncés ces dernières semaines» à les suspendre comme un moyen de pression sur l’économie américaine. «Nous devons faire nation», a insisté Eric Lombard, ministre de l’Economie, vendredi 4 avril sur RMC/BFMTV.

Une croissance «modérée», «positive» pour 2025

Éric Lombard estime qu’en cas d’accord avec le gouvernement de Donald Trump et de «désarmement des mesures qui ont été annoncées», la France pourrait toujours présenter une croissance «certes modérée mais positive» en 2025. Pour rappel, la Banque de France a déjà revu à la baisse les prévisions de croissance du PIB pour 2025 de +0,9% à +0,7%. En revanche, si les négociations échouent et qu’on entre alors dans une guerre commerciale, «on sera à l’évidence dans une situation économique beaucoup plus difficile», a mis en garde le patron de Bercy.

Pour autant, «même si la situation est dégradée», le gouvernement ne «va pas modifier le budget en matière de dépenses cette année. Les dépenses annoncées seront tenues», a garanti le ministre de l’Economie. Le locataire de Bercy semble toutefois anticiper un creusement du déficit français. «Les recettes baisseront, le PIB baissera par rapport à ce qui est prévu ce qui dégradera le taux de déficit», a expliqué Eric Lombard. Malgré tout, le ministre «ne souhaite pas donner un coup de rabot supplémentaire à la dépense publique» ce qui pourrait avoir «un impact négatif sur l'économie». La France s’est engagée devant ses partenaires européens à ramener son déficit à 5,4% du PIB en 2025. Selon le cabinet du ministre, cet objectif est préservé et reste une «priorité de l’action du gouvernement pour le rétablissement» des comptes. «Tous les efforts seront faits pour minimiser les risques liés à la guerre tarifaire pour l'économie française», a ajouté le cabinet.

Bercy donne rendez-vous le 15 avril prochain pour un premier point d’étape sur les conséquences des annonces américaines. «En cas de risque identifié sur la tenue de la dépense, des mesures de maîtrise seront annoncées», selon le ministère. En parallèle, Eric Lombard a annoncé l’ouverture de consultations avec «les partenaires sociaux», des «associations d’élus» et l’Etat concernant le budget 2026. Le ministre a donné le ton du budget de l’année à venir : pas de hausse d'impôt mais davantage de rigueur et d’efficacité concernant la dépense publique. Eric Lombard a appelé à plus de «solidarité» et «d’efforts» face à un monde qui change, le tout dans une situation économique «extrêmement risquée».