Pourquoi une procédure de destitution peut-elle être engagée ?

Une procédure prévue par l'article 68 de la Constitution

La procédure de destitution est prévue par l'article 68 de la Constitution. Cet outil constitutionnel permet de mettre fin au mandat du président de la République s’il a « manqué à ses devoirs de manière manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».

En cas de manquement du président

Le manquement du président peut concerner aussi bien son comportement politique que ses agissements privés, dès lors que ses actes sont incompatibles avec l’exercice de son mandat et portent atteinte à la dignité de la fonction. À l’inverse d’une démission, la procédure de destitution ne relève pas de la volonté du chef de l’État, mais d’une décision des parlementaires.

Comment la procédure de destitution du président de la République est-elle mise en œuvre ?

Une procédure prévue par la loi organique du 24 novembre 2014

La loi organique n° 2014-1392 du 24 novembre 2014 portant application de l’article 68 de la Constitution précise les conditions de mise en œuvre de la procédure de destitution.

Dépôt d'une proposition de résolution et réunion du Parlement en Haute Cour

La procédure débute par le dépôt d’une proposition de résolution motivée et signée par au moins un dixième des membres de l’Assemblée nationale ou du Sénat dont elle est issue. Une fois ce premier cap franchi, les deux chambres du Parlement se réunissent en Haute Cour.

Transmission de la proposition de résolution à la commission des lois

La proposition de résolution est ensuite transmise à la commission des lois. Elle a alors deux options :

  • ne pas examiner le texte, dans ce cas, la procédure s’arrête automatiquement.
  • examiner la proposition, puis l’adopter ou la rejeter.

Inscription de la proposition à l'ordre du jour d'une séance publique

Quelle que soit la décision de la commission, la proposition doit ensuite être inscrite à l’ordre du jour d’une séance publique dans un délai de 13 jours. Si ce délai n’est pas respecté, la proposition est considérée comme caduque (elle n’a plus d’effet).

Elle ne peut être adoptée qu'en séance publique par l’Assemblée nationale ou par le Sénat, à la majorité des deux tiers de leurs membres. Une fois adoptée, la proposition est transmise à l’autre assemblée, qui dispose de 15 jours pour se prononcer :

Adoption de la proposition de destitution

Cette instance exceptionnelle a le pouvoir de destituer le président par un vote à la majorité des deux tiers de ses membres. Si la destitution est votée, elle met fin aux fonctions du président de la République.

Le peuple peut-il destituer le président en France ?

En France, le peuple n’a pas la possibilité de destituer directement le président. Contrairement à certains pays où le référendum révocatoire existe (Équateur, Cuba, Taïwan...), la Constitution française ne prévoit pas une telle procédure. En revanche, les citoyens peuvent faire pression sur les parlementaires afin de pousser à l’ouverture d’une procédure de destitution.

Qui remplace le président en cas de destitution ?

Si le président de la République est destitué, c’est le président du Sénat qui est chargé de l'intérim. Cette règle vaut également en cas de décès ou de démission du chef de l’État. Sa mission est d’assurer la continuité de l’État jusqu’à l’élection d’un nouveau président, qui doit être organisée dans un délai maximum de 35 jours.

Quel président a été destitué en France ?

Proposition de résolution en 2016 du groupe Les Républicains (LR)

À ce jour, aucun président de la République française n’a été destitué. Si la procédure existe, elle n'a pour autant elle n'a jamais été menée à son terme. En novembre 2016, le groupe Les Républicains (LR) avait déposé une proposition de résolution. Ils souhaitaient la destitution du président de la République François Hollande dans le cadre d’une affaire de divulgation d'informations secrètes lors des opérations militaires en Syrie. Mais cette dernière avait été déclarée irrecevable par le bureau de l'Assemblée nationale.

Proposition de résolution en 2024 du groupe La France insoumise (LFI)

En septembre 2024, le groupe La France insoumise (LFI) a également déposé une proposition de résolution pour la destitution du président de la République Emmanuel Macron, là encore déclarée irrecevable par le bureau de l'Assemblée nationale.

Pourquoi parle-t-on de destitution d’Emmanuel Macron ?

Depuis son premier quinquennat, Emmanuel Macron a régulièrement fait l’objet d’appels à la destitution de la part de ses opposants. Des élus de La France insoumise (LFI), notamment, ont déposé plusieurs propositions de résolution, accusant le président de la République de mettre en danger l’État social ou de ne pas respecter certains engagements démocratiques. Toutefois, ces tentatives sont restées vaines : faute de majorité.

La dernière en date remonte au 9 septembre 2025. Suite à l'échec du vote de confiance de François Bayrou et de sa démission, la France insoumise a déposé une motion de destitution à l'encontre d'Emmanuel Macron. « Nous ne voulons pas d’un énième Premier ministre qui continuerait la même politique », a expliqué la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, à l’Assemblée nationale, quelques heures avant le dépôt de cette motion de destitution. Elle a été signée par 86 députés.

Qui remplace le président en cas de démission ?

En vertu de l'article 7 de la Constitution, l’intérim du chef de l'État est exercé par le président du Sénat jusqu'à l’élection du nouveau Président. Dès la démission ou le décès du président en exercice, les pouvoirs du chef de l’État par intérim prennent immédiatement effet. Toutefois, afin de prévenir toute dérive, ce dernier ne dispose pas de l’ensemble des prérogatives présidentielles. Il lui est notamment interdit :

Si le président du Sénat est dans l’incapacité d’assurer l’intérim, la charge revient alors au gouvernement, qui exerce la fonction de manière collégiale.