En ce jour de novembre 2022, les douaniers de l'aéroport de Saint-Denis de la Réunion sont sur les dents. Ils ont été avertis par les gendarmes d'un possible trafic de serins du Mozambique, une espèce protégée en provenance de l'île Maurice. Ce qu'ils découvrent dans les bagages d'un passager leur soulève le coeur : un millier de ces volatiles, entassés dans des tubes en PVC, dont une centaine déjà morts du fait de ces conditions de transport. Lorsqu'il s'agit de faire fructifier leur trafic, l'imagination et la cruauté des contrebandiers d'animaux n'ont pas de limite. Comme ce Néerlandais arrêté à Cayenne, il y a un peu plus de dix ans déjà, avec 12 colibris scotchés à l'entrejambe, dans des poches aménagées entre son pantalon et son slip. Ou cet autre voyageur contrôlé à la gare de l'Est, en février dernier, qui avait dissimulé 21 reptiles dans des chaussettes au fond de sa valise.

Il faut dire que les revenus générés par ce marché noir méconnu font saliver : au niveau mondial, il pèserait près de 25 milliards d'euros par an. Vendu sous le manteau, un perroquet d'Amérique latine peut rapporter jusqu'à 16 000 euros ou un singe magot 2 000 euros. Le changement climatique et l'artificialisation des sols menacent les espèces exotiques tout en arrangeant les affaires des trafiquants car ce qui est rare est cher. De par sa situation géographique et son passé colonial, la France est devenue une des plaques tournantes de ces flux illégaux. Nos propres animaux se font également piller, à l’image des lambis, ces coquillages des Antilles très largement pêchés, ou des tortues charbonnières de Guyane. Si les trafics de tout poil se multiplient autant, c’est aussi que les peines encourues sont moins lourdes qu’en matière de stupéfiants: trois ans d’emprisonnement maximum et jusqu’à 150 000 euros d’amende (rehaussés à sept ans et 750 000 euros si l’infraction est commise en bande organisée). A l’autre bout de la chaîne, et comme dans n’importe quel commerce illicite, on trouve des consommateurs prêts à tout pour se procurer leur marchandise. Soit parce qu’ils sont des collectionneurs en quête de faune exotique à domestiquer. Soit parce que ce sont des mets rares qu'ils recherchent.

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