
Votre locataire ne paie plus son loyer depuis plusieurs mois mais refuse de quitter le logement malgré une décision de justice en sa défaveur ? Pas question de le forcer à partir sans l’aide de la police, vous seriez passible de trois ans de prison et de 30 000 euros d’amende ! Vous devez solliciter auprès du préfet de département, par l’intermédiaire d’un huissier de justice, le concours de la force publique pour expulser votre locataire. Un concours que la préfecture peut cependant refuser en raison de l’âge ou de la situation familiale de l’occupant du logement.
Mais «l’Etat (étant) tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires, son (refus) ouvre droit à réparation», selon l’article L 153-1 du code des procédures civiles d’exécution. Le propriétaire bailleur peut donc demander au préfet une indemnisation en cas de refus du concours des forces de l’ordre. Un droit «théorique», avait nuancé la commission des affaires économiques du Sénat, lors de l’examen de loi dite «anti-squat» promulguée en 2023 et portée par le député Ensemble pour la République et ancien ministre du Logement Guillaume Kasbarian.
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Vers une réparation intégrale du préjudice subi par le bailleur
Les sénateurs jugeaient en effet cette procédure d’indemnisation si «complexe et aléatoire, (avec des) règles appliquées de manière différente selon les préfectures, que de nombreux propriétaires renoncent à la demander». La commission des affaires économiques avait ainsi obtenu l’ajout d’un article dans la «loi Kasbarian», destiné à clarifier et harmoniser les règles d'indemnisation par un décret soumis à l’avis du Conseil d’Etat. Ce décret a été «enfin publié» au Journal officiel du 6 novembre dernier, écrit sur son compte LinkedIn Romain Rossi-Landi, associé du cabinet d’avocats éponyme. Entré en vigueur le 7 novembre, il prévoit notamment que les préjudices du propriétaire «doivent être en lien direct et certain avec la décision de refus d'octroi du concours de la force publique».
Selon Romain Rossi-Landi, «cette précision devrait désormais obliger les préfets à une réparation intégrale du préjudice et à ne plus limiter l’indemnisation aux seules indemnités d'occupation». De fait, le décret précise que «sont réparables par l'Etat les préjudices suivants» : la perte des loyers et des charges récupérables auprès du locataire ; la perte de valeur du bien à la revente ; les frais liés à l'impossibilité de vendre le logement ; les frais de remise en état du bien ; les frais de commissaire de justice ; la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
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Des procédures à venir devant les tribunaux
Le décret précise également «la période de responsabilité de l’Etat», qui démarre à compter de la date du refus du concours de la force publique. Elle se termine lorsque le préfet finit par accorder le concours de la police, ou quand le locataire se résout à quitter les lieux, ou encore au décès de ce dernier ou bien à la date de vente du logement. C’est au titre du délai courant entre ces deux dates que vous pourrez être indemnisé.
Autant de nouvelles dispositions qui «étaient très attendues par mes clients depuis la loi Kasbarian», souligne Romain Rossi-Landi, ajoutant que, sur la base de ce décret, son cabinet «va lancer plusieurs procédures devant les tribunaux administratifs».




















