S’estimant «abandonné par un système pourtant censé protéger les propriétaires autant que les locataires», Romain avait tenu à «alerter sur un calvaire qui peut arriver à n’importe quel bailleur», en témoignant auprès de Capital en mars dernier. Ce calvaire, c’est celui des impayés de loyer, contre lesquels le député Corentin Le Fur (Droite républicaine, Côtes-d’Armor) entend «défendre les propriétaires», via une proposition de loi (PPL) cosignée par 19 autres parlementaires de son parti, et déposée à l’Assemblée nationale ce mercredi 30 septembre.

«Trop de propriétaires se retrouvent aujourd’hui pris au piège» des impayés de loyer, déplore Corentin Le Fur dans l’exposé des motifs de sa PPL. «Faute d’un cadre juridique suffisamment protecteur, ils deviennent les victimes de locataires mauvais payeurs qui profitent des lenteurs administratives et de la complexité de la législation pour ne pas honorer leurs loyers», dénonce-t-il. Or l’investissement locatif est «majoritairement l’œuvre de ménages de la classe moyenne, qui investissent dans la pierre pour disposer d’un complément de revenus à la retraite, et non de spéculateurs», assure le député.

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Les impayés de loyer, un coût de plusieurs milliers d’euros

Nombre de ces propriétaires bailleurs se retrouvent donc en difficulté financière lorsqu’ils ne perçoivent plus les loyers permettant de rembourser la mensualité de crédit et de payer les charges de copropriété, ainsi que la taxe foncière. Sans oublier le coût des réparations, certains logements étant restitués «dans un état déplorable après des mois, voire des années, d’occupation gratuite», dénonce Corentin Le Fur.

S’ajoutent également les frais juridiques de «procédures longues et coûteuses» pour tenter de récupérer le bien, souligne le parlementaire, citant un coût total de «plusieurs milliers et, parfois, de plusieurs dizaines de milliers, d’euros». Notre témoin Romain, qui ne percevait plus ses 950 euros de loyers mensuels depuis mars 2024, avait fait ses calculs : si son locataire finissait par être expulsé en mars 2026, il aurait perdu près de 25 000 euros au total, entre les impayés de loyer, les frais d’huissier et les honoraires d’avocat.

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Parfois plusieurs années pour expulser un locataire qui ne paie plus

«Par peur des mauvais payeurs, nombre de propriétaires renoncent à la location de longue durée, ce qui contribue à réduire l’offre locative et à aggraver la crise du logement», pointe le député. Afin de «rétablir l’équilibre entre bailleurs et locataires», sa proposition de loi vise à accélérer la procédure d’expulsion en cas d’impayés de loyer. «Nos compatriotes ne comprennent pas qu’il faille parfois plusieurs années pour expulser un occupant qui ne paie pas», argumente Corentin Le Fur.

D’abord, la PPL modifie l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, afin de diviser par deux, de six à trois semaines, le délai laissé au locataire pour régulariser sa dette. Elle précise ensuite que l’octroi de délais par le juge n’est possible qu’en cas de bonne foi du locataire, prouvée par exemple par sa détermination à reprendre le paiement du loyer une fois ses difficultés surmontées. Par ailleurs, la proposition de loi complète le code des procédures civiles d’exécution en créant une procédure spécifique devant le juge des contentieux de la protection, qui devra statuer dans un délai de 30 jours au maximum sur une demande d’expulsion.

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Obtenir plus vite le concours de la force publique

Enfin, la PPL modifie l’article L. 153‑1 du code des procédures civiles d’exécution, pour imposer à l’État de statuer dans un délai d’un mois sur toute demande de concours de la force publique pour procéder aux expulsions. Celles-ci «demeurent trop lentes, trop incertaines, et interviennent trop tardivement faute de concours rapide de la force publique», estime Corentin Le Fur. Reste à savoir quand sa proposition de loi pourra être examinée par le Parlement, dans le contexte politique actuel, le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu n’ayant toujours pas nommé son gouvernement.