
Dernière ligne droite. Mardi 17 juin, les partenaires sociaux, qui discutent déjà depuis 6 mois, doivent se réunir pour la dernière fois dans le cadre du conclave sur la controversée réforme des retraites. François Bayrou a lancé en janvier dernier ce nouveau cycle de négociations alors que la gauche réclamait une suspension de la réforme de 2023, qui prévoit notamment le recul de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.
Plusieurs partenaires sociaux ont déjà claqué la porte du conclave comme FO et la CGT. Reste le Medef, la principale organisation patronale, ainsi que la CPME, qui représente les petites et les moyennes entreprises. La CFDT, la CFTC et la CFE-CGC représentent, quant à elles, les salariés. Après des semaines de discussions, les partenaires s’opposent toujours sur l’âge légal de départ à la retraite que le Medef refuse catégoriquement de revoir à la baisse.
Une chance sur 2 que le conclave sur les retraites aboutisse à un accord
Pourtant, l’hypothèse d’un éventuel accord entre les participants au conclave pourrait bien devenir réalité. François Bayrou semble y croire. «Alors qu’on partait de positions très éloignées, il me semble que les choses ont quelque peu avancé», a confié le Premier ministre au journal la Tribune Dimanche, le 15 juin. «Je pense que la possibilité existe de trouver un accord dynamique, car ce qui est en gestation, c’est le retour de la démocratie sociale», a-t-il ajouté. Le chef du gouvernement n'exclut pas, en revanche, que les partenaires sociaux «aient besoin de quelques jours de plus» pour trouver un terrain d’entente, comme il l’a précisé au Parisien dimanche.
Interrogé par la Tribune Dimanche, Patrick Martin, à la tête du Medef, table sur 50% de chances de trouver un accord. Sa collègue Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, qui a elle aussi répondu aux questions du journal du groupe CMA Média, abonde dans le même sens. Face à la fermeté du Medef sur le maintien de l’âge de départ à 64 ans, la syndicaliste semble être prête à passer outre mais à condition que le patronat fasse lui aussi des efforts. «Il n'y aura pas d'accord avec la CFDT si le patronat n'avance pas plus sur la pénibilité, s'il n'avance pas sur le volet réparation», a-t-elle déclaré dans la Tribune Dimanche.
La pénibilité, sujet de discorde entre la CFDT et le Medef
La CFDT souhaite que l’âge de départ à la retraite à taux plein aujourd’hui à 67 ans passe à 66 ans, une idée proposée par la CFTC. «C’est une mesure de justice sociale, qui bénéficiera notamment aux femmes dont les carrières sont souvent interrompues», justifie Marylise Léon. Pour Patrick Martin cela «n’aurait de sens que si les organisations syndicales proposent des économies à due concurrence». Selon lui, cette mesure «coûte très cher : 1,2 milliard en 2030, 5,5 milliards en 2046».
La CFDT réclame aussi «un droit opposable pour que les salariés qui veulent ouvrir leurs droits à la retraite progressive à 80 % dès 60 ans puissent le faire», explique Marylise Léon. Le syndicat souhaite que les salariés confrontés à des conditions de travail difficiles (port de charges lourdes, postures pénibles, exposition aux vibrations mécaniques) puissent partir à la retraite avant l’âge légal de départ. Initialement «opposé à toute évolution de l’usure professionnelle», le Medef a proposé de repenser le compte professionnel de prévention pour qu’il prenne en compte ces critères de pénibilité. Une proposition jugée insuffisante par la CFDT, qui estime la position du Medef «inacceptable». «Il doit accepter des départs anticipés de salariés exposés à la pénibilité», exige l’organisation syndicale.
L'organisation patronale propose également de «modifier le dispositif de l'inaptitude/ invalidité qui concerne aujourd'hui près d'une personne sur 7 qui liquide sa retraite», en «abaissant l'âge de départ de 62 ans à 61 ans». Un semblant de consensus semble émerger sur la situation des femmes. Le Medef, dans un document transmis à la presse le 11 juin, suggère de «permettre aux femmes ayant acquis des trimestres liés à la maternité de bénéficier d’une amélioration de leur niveau de pension en modifiant le calcul du salaire annuel moyen». Ce dernier serait «calculé non plus sur les 25 meilleures années mais sur 23 ou 24 années, ce qui mécaniquement améliorera leur niveau de pension». Pour financer le surcoût, «la surcote parentale à partir de 63 ans, instaurée par la réforme Borne, serait supprimée (neutralisation de l’impact financier)», propose le Medef. Si l’idée semble convaincre les syndicats, ce n’est pas le cas du financement.
François Bayrou veut une issue positive au conclave sur les retraites
En parallèle, le15 juin, François Bayrou a évoqué dans la Tribune Dimanche la possibilité de proposer des «idées nouvelles» afin de débloquer au plus vite la situation. C’est chose faite. Lundi, le premier ministre a confirmé avoir proposé aux partenaires sociaux «l'idée» d'une «prime» pour les salariés seniors qui «décident de rester au travail», en leur versant «une partie de (leur) retraite en plus de (leur) salaire». «C'est une proposition que j'ai faite individuellement à chacun des protagonistes» et «je suis persuadé que tout le monde a à y gagner», a lancé le Premier ministre lors d'un déplacement au salon aéronautique du Bourget. Le chef du gouvernement présente cette idée comme un «encouragement à l'activité» qui pourrait permettre à terme un «meilleur équilibre financier» du système de retraite.
Si un accord venait à être trouvé, François Bayrou présentera le projet aux députés comme il s’y était engagé. La France insoumise et les écologistes ont déjà annoncé vouloir voter une motion de censure contre l’accord issu du conclave. Pour le moment, le soutien du Parti socialiste et du Rassemblement national reste hypothétique.



















