Depuis plusieurs années, les gouvernements multiplient les moyens pour débusquer les fraudes aux aides sociales. Mais ces efforts se heurtent à une réalité moins évidente que ce que les chiffres pourraient laisser croire. Selon Philippe Crevel, économiste et directeur général du Cercle de l’épargne, il faut prendre en compte le coût pour lutter contre cette fraude sociale. «A un moment donné, ça peut coûter plus cher que le montant qui sera recouvré» affirme-t-il dans son intervention du 12 août sur Radio Classique reprise par BFMTV.

Malgré l’intensification des contrôles, les montants réellement récupérés restent dérisoires : seuls 600 millions d’euros ont été recouvrés ces dernières années, d'après le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS). Un niveau bien en deçà du manque à gagner estimé, qui atteint 13 milliards d’euros selon le même organisme.

Une lutte coûteuse pour des montants limités

La fraude visée par le gouvernement est «extrêmement pointiste», composée de cas isolés souvent difficiles à identifier car parfois localisés à l’étranger ou liés à des sommes minimes. Philippe Crevel explique : «On ne rattrape pas d’un coup 50 millions ou 100 millions. Là, on est sur des petites sommes et c’est extrêmement compliqué, coûteux, cela nécessite du temps, du personnel derrière. C’est très compliqué d’aller chercher au cas par cas». Selon lui, «ce n'est pas ça qui va complètement rétablir l'équilibre des finances publiques, c'est une illusion d'optique».

L'exécutif prévoit dans un projet de loi, examiné cet automne, que l’assurance chômage soit versée uniquement sur un compte bancaire situé en France ou dans l’Union européenne, de préférence un compte courant, plaide Philippe Crevel. L’administration mise également sur l’intelligence artificielle pour accélérer et affiner les détections frauduleuses. D’après Philippe Crevel, l’IA «permettra justement d’aller plus vite, et avec beaucoup plus de précision que dans le passé».