Rebelote. L’Elysée avait annoncé que le président de la République nommerait un nouveau Premier ministre d’ici vendredi 10 octobre. C’est chose faite. Emmanuel Macron a décidé de reconduire Sébastien Lecornu, qui avait pourtant remis sa démission lundi 6 octobre, estimant que les «conditions» n’étaient «pas réunies».

L’ex-ministre des Armées a mené à bien une «mission flash» confiée par le chef de l’Etat après l’annonce de son départ. Sébastien Lecornu avait 48 heures pour poursuivre les négociations avec les oppositions, afin de trouver, enfin, un accord concernant le budget 2026, lequel doit être impérativement déposé au Parlement avant le 13 octobre. À défaut, l’adoption du projet de loi de finances avant la fin de l’année 2025 serait compromise. L’ex-Les Républicains, qui a été membre de tous les gouvernements d’Emmanuel Macron depuis 2017, avait pourtant exclu de revenir à Matignon. «Je ne cours pas après le job», a-t-il assuré mercredi soir sur le plateau du 20 Heures de TF1, considérant que sa «mission est terminée».

Nommé Premier ministre une première fois le 9 septembre 2025, ce proche d’Emmanuel Macron détient le triste record du chef de gouvernement le plus éphémère de la Ve République. Au total, l’homme politique de 39 ans serait resté 27 jours en poste. Annoncé le dimanche 5 octobre, et composé d’une très grande majorité de ministres reconduits (12 sur les 18 nommés), son gouvernement aura vécu seulement 14 heures. C’est justement le manque de nouveauté qui lui a été reproché par les oppositions et même par certains membres dudit gouvernement. Bruno Retailleau, alors reconduit au ministère de l’Intérieur, avait déclaré publiquement que la composition du gouvernement ne «reflétait pas la rupture promise». Mercredi, Sébastien Lecornu a plaidé «coupable» sur le «manque d’originalité» de son gouvernement.

Celui qui se définit comme «moine soldat» a redit mercredi son absence d’ambition présidentielle pour 2027, concentrant ses efforts sur la recherche d’un compromis autour du budget 2026, condamnant au passage les «appétits partisans». «L’équipe qui devra prendre les responsabilités, quelle qu’elle soit, devra être complètement déconnectée des ambitions présidentielles pour 2027», a insisté celui qui rempile pour le poste de Premier ministre. Ses mots semblent avoir convaincu les Français, qui étaient 7 millions devant leur téléviseur mercredi soir. Originaire de Normandie et petit-fils de résistant, Sébastien Lecornu a gagné 11 points dans le baromètre Elabe avec 28% d’opinions positives, ce qui fait de lui la septième personnalité politique préférée des Français.

Dans un long tweet publié sur son compte X, Sébastien Lecornu a immédiatement réagi à sa renomination. «J’accepte - par devoir - la mission qui m’est confiée par le Président de la République de tout faire pour donner un budget à la France pour la fin de l’année et de répondre aux problèmes de la vie quotidienne de nos compatriotes», écrit-il. «Il faut mettre un terme à cette crise politique qui exaspère les Français et à cette instabilité mauvaise pour l’image de la France et ses intérêts», insiste-t-il.

«Tous les dossiers évoqués pendant les consultations menées ces derniers jours seront ouverts au débat parlementaire : les députés et sénateurs pourront assumer leur responsabilité, et les débats devront aller jusqu’au bout», précise-t-il, ajoutant que «la nouvelle équipe gouvernementale devra incarner le renouvellement et la diversité des compétences».

Un budget 2026 sous haute tension et des dossiers brûlants à venir

À peine renommé, le nouveau Premier ministre va devoir s’atteler au budget 2026. L’objectif est clair : déposer le projet au Parlement dès ce lundi afin de garantir les 70 jours de débats des parlementaires et de finir l’année avec un budget. Sébastien Lecornu va devoir convaincre la gauche, qui réclame la suspension de la réforme des retraites, une augmentation de la fiscalité pour les Français les plus riches et un engagement à ne pas utiliser l’article 49.3, qui permet d’adopter un texte sans vote des parlementaires.

Mais aussi la droite, les Républicains se disant prêts à certaines concessions sur la suspension de la réforme des retraites, à condition que le gouvernement fasse quelques pas en leur direction. La tâche s’annonce plus compliquée que jamais, alors que le «socle commun» sur lequel se reposaient jusqu’à présent les précédents gouvernements est fissuré.

Si Sébastien Lecornu passe l’épreuve du feu qu’est l’adoption du budget 2026, de nombreux autres dossiers l’attendent, comme le texte de programmation pluriannuelle de l’énergie, le projet de révision constitutionnelle pour la Corse, l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, la gestion de la crise des agriculteurs, notamment autour du Mercosur et de la loi Duplomb, ou encore la loi d’orientation des transports, bloquée dans l’attente du nouveau gouvernement.