
C’est au salon de l'immobilier MIPIM à Cannes que la ministre du logement, Valérie Létard, a détaillé son plan de soutien et de relance pour le logement. Il a du souffle. Si plusieurs mesures étaient déjà connues puisqu’elles figuraient dans le budget récemment imposé par vote bloqué par le gouvernement, la communauté professionnelle a découvert les autres. Pourquoi? Simplement parce qu’elles ne sont pas de nature budgétaire, et relèvent de deux champs, le champ juridique et le champ pratique. À plus d’un titre, il faut s’arrêter sur ce constat, derrière lequel se cachent deux réalités majeures pour les années qui viennent.
D’abord l’allocation budgétaire 2025 pour le logement marque un retrait par rapport au budget 2024 en termes d’enveloppe, et ce n’est que le début d’un processus : le logement a dû participer à la résorption du déficit public abyssal et devra le faire dans le futur plus encore. L’essentiel a été sauvé par Valérie Létard, et le logement fait figure de priorité du gouvernement entre tous les secteurs. Elle a d’ailleurs à cet égard préempté le budget 2026 en annonçant la mission confiée à Mickaël Cosson et Marc-Philippe Daubresse pour bâtir un statut fiscal de l’investisseur immobilier et en outre plusieurs mesures du budget 2025, valables pour deux, impacteront encore 2026, telles que le PTZ et l’exonération de droits de donation pour l’achat d’un logement neuf ou la rénovation énergétique d’un logement existant, ainsi que l’exclusion des primo-accédants de la hausse des droits de mutation à titre onéreux. Il reste que le budget pour 2026 sera plus frugal que le budget 2025 et que cette érosion ne s’arrêtera pas au cours des prochaines années : le Premier ministre, dimanche 16 mars sur France Inter, a averti l’opinion…et ses ministres.
Incitation à l'innovation privée
Surtout, l’heure est venue pour l’exécutif de privilégier les dispositions civiles et l’incitation à l’innovation privée. Les priorités de Valérie Létard sont pour la plupart choisies sur ce terrain : la réduction de la complexité des documents d’urbanisme, l’invention de nouveau types de permis d’aménager, la réduction des délais de recours, la prolongation de deux ans de la validité des permis de construire délivrés en 2022 et 2023, la simplification des normes, la proposition de loi à venir de Romain Daubié pour faciliter la transformation des bureaux en logements mais aussi généraliser le permis multi-destinations et la réversibilité d’usage, le futur plan pour accompagner la transformation d’immeubles de toutes destination en logements, l’exonération de taxe sur les bureaux pour les surfaces tertiaires en cours de transformation, toutes ces initiatives ne coûtent pas ou coûtent peu et libèrent les énergies.
La ministre, dans la continuité de la loi ELAN, veut également que l’intelligence artificielle profite à la productivité de la construction et à la baisse des coûts, en permettant le développement d’outils numériques pour catalyser les procédures, optimiser l’identification du foncier disponible, notamment aérien, et faciliter le financement des projets. Elle a nommé un référent au sein de son ministère qui serve de relais entre l’administration et les start-ups spécialisées en la matière. Valérie Létard entend aussi booster les évolutions dans les process de production, hors site ou à l’inverse privilégiant les circuits courts avec des matériaux locaux, le recours majorés aux matériaux biosourcés…
Une version moderne de l'Etat providence
Le message est clair : la politique du logement cesse d’être un guichet ouvert pour distribuer les crédits publics, de plus en plus rares, et elle est plutôt un facilitateur, qui lève les freins, infiniment trop nombreux et trop serrés dans notre pays. Elle sera là en outre pour valoriser la créativité professionnelle, là où l’approche quantitative a fini par la faire oublier. Pourtant, notre pays sait sortir des sentiers battus pour construire, entretenir, gérer. A bon entendeur… La filière du logement peut compter sur des adaptations juridiques bienvenues sinon salutaires, souvent attendues depuis longtemps…et sur ses propres ressources pour innover et gagner en efficacité tous azimuts. En quelque sorte «Aide-toi et l’État t’aidera.» Une version moderne de l’État providence.



















