Le pessimisme n’est plus de mise : l'amortissement des investissements locatifs privés neufs et existants avec travaux a bien des chances de voir le jour. Pourtant, étrangement, on lit, on entend ici ou là de la part d’acteurs de la filière des messages d’abattement et de découragement. Pourquoi ? Pour deux raisons essentielles. D’abord la communauté du logement s’est habituée au malheur politique depuis les années récentes. L’arrivée à l’Élysée du Président Macron a tout de même eu deux conséquences : une mésestime affichée des investisseurs immobiliers au sommet de l’État et une baisse tendancielle des crédits alloués au logement, notamment au soutien à l’investissement locatif privé. Tout se passe comme si la filière était atteinte du syndrome de Stockholm… Certains vont jusqu’à trouver que la mariée est trop belle, que les taux d’amortissement proposés par le rapport Daubrssse-Cosson, parlementaires missionnés par la ministre du logement Valérie Létard pour préfigurer le régime fiscal de l’investisseur, sont trop élevés pour être acceptés par Bercy. Bizarre, après des années de combat, d’avoir quelque chose comme la peur de gagner, éprouvée par les finalistes des grandes compétitions sportives.

Une seconde cause de l’abattement ambiant tient à la période économique. Le déficit de notre pays est tel qu’on ne croit pas à l’acceptabilité budgétaire de la mesure. À cet égard, les deux parlementaires, en liaison avec les ministères concernés, ont estimé le coût et le rapport de la mesure ; le coût se chiffre en moindres rentrées fiscales du fait des réductions d’impôts perçus liées à l’amortissement. Le rapport tient à la TVA générée par les achats dans le neuf et les travaux sur existant, en faveur de l’État, et les droits de mutation à titre onéreux au profit des collectivités locales, les départements essentiellement. Le rapport rend public un calcul jamais fait : le solde net annuel de la mesure, grâce à des prévisions de nombre d’opérations d’investissement et du montant des travaux associés – au demeurant très prudentes et probablement en deçà de ce que sera la réalité. Les chiffres sont sans appel : l’amortissement crée de la richesse dès l’année 2026, à raison de 500 millions, pour monter en régime jusqu’à 2,3 milliards en 2030.

Investissement locatif : un coût bien plus élevé que prévu pour le futur statut du bailleur privé ?

Pour la première fois, les électeurs pourraient préférer les maires bâtisseurs

Sans compter les effets induits : l’amortissement va endiguer les hémorragies sur l’emploi dans la filière, particulièrement en amont, dans le bâtiment : au moment où s’écrivent ces lignes, près de 200 emplois par jour ouvrable sont détruits dans le tissu des entreprises tous corps d’État, avec le coût en indemnités chômage que cette situation entraîne.

L’argument économique est sans conteste le plus fort pour convaincre le ministère du budget, Matignon et le parlement des bienfaits de l’amortissement. Il y en a pourtant un autre : l’insuffisance d’offre locative crée des tensions sociales palpables. Trouver un logement à louer dans nos territoires, dans les métropoles à un degré supérieur, dans le parc privé comme dans le patrimoine des organismes HLM, relève de l’exploit. Les préjudices sur la vie des ménages, leur mobilité pour l’emploi, le développement des entreprises et des commerces par voie de conséquence, les parcours d’études supérieures, la natalité… sont considérables. La pression sur les maires est tellement forte que les meilleurs observateurs considèrent que pour la première fois les électeurs en mars 2026 pourraient bien préférer les maires bâtisseurs aux maires frileux en la matière. En somme, le social rejoint l’économique : sans offre suffisante de logements, la respiration du pays est empêchée et la croissance suffoque.

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Pas de budget en 2026 ?

L’amortissement des logements locatifs verra le jour…pour peu que les députés soient assez responsables et ne censurent pas le gouvernement lors du vote du budget. Car là est le pire risque désormais : la France pourrait, comme l’an dernier, n’avoir pas de budget pour l’année à venir, parce qu’elle n’aurait plus de  gouvernement. Misons que les parlementaires ne sacrifieront pas la richesse du pays et le bonheur de la nation sur l’autel des querelles politiques.