«En cinq ans et demi, j'ai connu six ministres du Logement !», s'exclamait auprès de Capital Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), lors des Renodays qui se sont déroulés les 7 et 8 octobre. En voici un septième : Vincent Jeanbrun, député Les Républicains du Val-de-Marne mais exclu du parti LR dès sa nomination, succède à Valérie Létard au ministère du Logement, dans le gouvernement formé ce dimanche 12 octobre par le Premier ministre Sébastien Lecornu. Un ministre de plein exercice et non plus seulement un ministre délégué au Logement, se félicitent Danielle Dubrac, présidente du syndicat immobilier Unis, Norbert Fanchon, président du promoteur Groupe Gambetta, la Fédération des offices publics de l'habitat (FOPH) ou encore la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) et l'Union sociale pour l'habitat (USH). Le portefeuille de Vincent Jeanbrun comprend également le ministère de la Ville, qui était dévolu à Juliette Méadel dans le gouvernement Bayrou.

Il faut dire que Vincent Jeanbrun avait présenté, le 28 juin dernier, dans un entretien au Parisien, un plan pour les banlieues, intitulé «Réparer les quartiers - Rétablir la République», avec lequel il entendait notamment lutter contre la délinquance dans les logements sociaux. Décidé à «mettre fin au logement social à vie», il défendait dans ce plan un système de bail 3, 6, 9. «Tous les trois ans, on regarde la situation de la famille, ses revenus, les personnes à charge. S'il y a un trouble de jouissance, on n'encombre pas la justice. Si on sait qu'une famille pose un problème, le bailleur pourra ne pas renouveler le bail», développait-il dans cet interview, martelant que «le logement social est une chance, pas une rente».

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Une enquête pour favoritisme dans l'attribution de logements sociaux

Une mesure qui «montre une méconnaissance du secteur. C'est oublier que tous les trois ans, les bailleurs sociaux contrôlent les revenus de leurs résidents et des compléments de loyers sont imposés à ceux qui dépassent les plafonds», s'agaçait Jean-Claude Driant, professeur émérite à l'École d'urbanisme de Paris (EUP), spécialiste des politiques locales de l'habitat, dans les colonnes du Parisien. «Je suis un enfant des barres HLM de la ville (L'Haÿ-Les-Roses) dont j'ai été maire. Je ne suis pas du tout certain que j'aurais pu avoir le même parcours en naissant aujourd'hui. Il faut un réveil républicain, se défendait Vincent Jeanbrun. La société dans laquelle j'ai grandi, ce modèle de République universaliste, fraternelle, peut disparaître à tout moment», estimait celui dont le domicile avait été ciblé par une voiture-bélier, blessant sa femme, lors des émeutes de l'été 2023 après la mort du jeune Nahel.

Les autres mesures du volet logement du plan banlieues de Vincent Jeanbrun visaient à multiplier la vidéosurveillance dans le parc social, à interdire le paiement en liquide des loyers pour éviter le blanchiment, à instaurer un «plafond anti-ghetto» de 30 % de logements sociaux dans chaque commune et à créer des logements sociaux temporaires, qui seraient revendus au bout de 30 ans, afin de «faire de la France un pays de propriétaires». «Nommer ministre du Logement Vincent Jeanbrun, auteur d'un rapport proposant la vente massive de logements sociaux, est une provocation caricaturale.La mise en oeuvre de ses propositions ultra-libérales aggraverait encore une crise du logement déjà terrible. La vente massive de logements sociaux a été une catastrophe partout en Europe», tacle Jacques Baudrier, adjoint à la maire de Paris en charge du logement.

Par ailleurs, selon une enquête de Mediapart publiée en septembre 2024, deux collaborateurs de Vincent Jeanbrun auraient bénéficié de logements appartenant au syndicat funéraire qu'il préside, à un tarif très inférieur au marché. L'affaire est entre les mains de la justice, selon Le Parisien, à qui Vincent Jeanbrun avait assuré, en juin dernier, sur le fait que ses décisions sont «toujours prises dans le strict cadre légal, réglementaire et font l'objet d'un contrôle et d'un suivi par l'administration du syndicat».