Le ministre démissionnaire de l’Economie, Roland Lescure, se veut formel : la France disposera bien d’un budget en 2025. «Il y a une majorité de parlementaires en France qui veulent la stabilité (...) et qui s'accordent sur une chose, c'est que nous avons besoin d'un budget pour 2026, (...), donc c'est ce qu'il va se passer», a-t-il assuré jeudi 9 octobre, avant une réunion avec ses homologues de la zone euro. Mais la tâche s’annonce loin d’être aisée.

L’Elysée s’y est engagé : le Premier ministre a été nommé ce vendredi 10 octobre et... il s'agit de Sébastien Lecornu. Le locataire de Matignon devra relever un défi complexe : présenter un projet de budget au Parlement dès le lundi 13 octobre. En effet, il s’agit du dernier jour de la date limite pour déposer le projet de loi de finances (PLF). Sans cela, il sera difficile de garantir l’adoption du budget 2026 avant la fin de l’année 2025.

Garantir 70 jours de débat à l’Assemblée nationale et au Sénat

Le calendrier budgétaire est fixé par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Celle-ci prévoit que le budget doit être déposé au Parlement au plus tard le premier mardi d’octobre, soit, cette année, le 7 octobre. L’objectif est de garantir 70 jours d’examen à l’Assemblée nationale et au Sénat pour le projet de loi de finances (PLF). Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), quant à lui, dispose d’un délai d’examen de 50 jours. Heureusement pour le gouvernement, le calendrier accorde une légère marge de manœuvre jusqu’au 13 octobre, afin d’inclure les huit jours nécessaires au contrôle de constitutionnalité du texte budgétaire par le Conseil constitutionnel avant sa promulgation.

Par ailleurs, les gouvernements précédents ont déjà franchi plusieurs étapes indispensables à l’adoption du budget. Avant sa démission, Sébastien Lecornu a transmis son projet de budget au Haut Conseil des finances publiques (HCFP), qui l’a examiné tout au long de la semaine. Son avis, obligatoire, garantit la conformité constitutionnelle du texte budgétaire. Le HCFP a transmis «ce jeudi son avis au gouvernement, pour que, avant le 13 octobre, puissent être adoptés un projet de loi de finances et un projet de financement de la Sécurité sociale», a expliqué Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, l’organisme auprès duquel est placé le HCFP, dans une interview accordée au Parisien jeudi. Ce dernier a d’ailleurs averti le futur gouvernement : le «projet de loi de finances ne peut clairement pas être différent de celui que nous avons examiné», a affirmé Pierre Moscovici. Dans le cas contraire, «cela poserait d’un point de vue légal un problème inédit. Nous serions hors délais», a-t-il ajouté.

Des recours possibles si le budget n’est pas adopté au 31 décembre 2025

Le budget doit impérativement entrer en vigueur avant la fin de l’année en cours. La LOLF prévoit plusieurs solutions législatives en cas de blocage ou de retard. Le gouvernement peut notamment demander au Parlement d’adopter «uniquement la première partie du projet de loi de finances», celle qui concerne la perception des impôts et les grands équilibres financiers. La seconde partie peut, elle, être votée ultérieurement.

Si le budget n’est pas adopté avant le 31 décembre, l’exécutif peut faire voter une loi spéciale permettant d’assurer la continuité des services publics en reconduisant les crédits du budget de l’année précédente. L’an dernier, le gouvernement avait eu recours à cet outil, et le budget avait été définitivement adopté à la mi-février. L’article 47 offre également au gouvernement la possibilité d’utiliser les ordonnances, un instrument législatif permettant de faire adopter un texte sans suivre la procédure parlementaire classique. Le Parlement doit toutefois l’y autoriser expressément, dans un domaine précis.