Du rêve au cauchemar, il n’y a qu’un pas. Nadine peut en témoigner, après avoir été forcée à la rupture conventionnelle moins d’un an après son arrivée dans son entreprise. Dotée d’un solide réseau de contacts forgé par une longue carrière dans le secteur de l’électroménager - «18 ans en tant que commerciale au sein du groupe Whirlpool» -, Nadine est en recherche d’emploi lorsqu’elle est contactée par une entreprise. Salaire, poste, conditions de travail : tout en apparence lui convient… jusqu’au jour de la signature de son contrat de travail. «Je découvre que l’entreprise qui m’a recrutée n’est pas celle mentionnée dans mon contrat de travail.» L’explication ? «Quand j’arrive dans la “boîte”, on m’explique qu’il y a des centaines de micro-entreprises avec pas plus de 10-15 personnes au sein de chaque entité. Et il n’y a ni convention collective ni couverture maladie.»

Un premier couac d’entrée de jeu pour Nadine qui décide toutefois de passer outre, «le salaire étant très attractif». Cet accroc n’est que le premier d’une longue série. Recrutée en tant que commerciale, elle s’aperçoit vite que ses missions se cantonnent à se servir de son carnet d’adresses pour détecter les bonnes affaires. «Mais ce sont d’autres personnes qui font les achats», se lamente-t-elle. Une autre tromperie qui fait naître des tensions entre Nadine et ses collaborateurs en charge des achats.

Le seul rayon de soleil dans ce sombre horizon est l’excellente relation qu’elle entretient avec son manager. Un réconfort de courte durée car quitte l’entreprise peu de temps après son arrivée, remplacé par un nouveau manager. Evénement qui marque le début de la fin pour Nadine.

Un management toxique qui conduit au chantage à la rupture conventionnelle

Débute alors un management toxique qui «enclenche un harcèlement à mon égard. J’envoie alors un courrier interne expliquant les agissements de mon manager». Néanmoins, le mal est fait et Nadine n’a d’autre choix que de se mettre en arrêt maladie. «Je ne pouvais plus le supporter», se souvient-elle. A son retour, un nouveau manager lui est assigné, avec lequel elle s’entend très bien. La fin des ennuis ? Que nenni, ce dernier quittant très rapidement l’entreprise par le biais d’une rupture conventionnelle sous la contrainte : , «Il a signé sous la menace d’un licenciement, comme je le ferai peu de temps après», raconte-t-elle.

Neuf mois après son embauche, Nadine reçoit via sa messagerie professionnelle une invitation à une réunion appelée “point”. Ne sachant pas de quoi il en retourne, elle s’y rend avec ses chiffres, «réflexe de commercial». C’est alors que le piège se referme sur elle. D’emblée, on lui lance que ses résultats ne sont pas à la hauteur. Et hors de question de discuter le jugement du directeur des ressources humaines, qui coupe court au dialogue : «Je ne suis pas là pour ça, assène-t-il. Mon objectif est de vous proposer une rupture conventionnelle, libre à vous d'accepter ou de refuser.»

Il liste alors à Nadine toutes les “vertus” de la rupture conventionnelle, comme les droits au chômage, l’indemnité associée à la rupture. Une indemnité qui, dans le cas de notre témoin, se limite au strict minimum : un quart de son salaire mensuel, soit l’indemnité légale. Et ce, alors que Nadine dispose dans son contrat de travail d’un préavis de trois mois en cas de licenciement. Ce qu’elle s’empresse de lui rappeler.

La réponse de son DRH fuse : «Si vous refusez, on rentre dans une procédure de licenciement et il en existe plusieurs types : celui avec trois mois de préavis et celui avec rien. Vous avez toujours la possibilité d’aller aux prud’hommes. Ce sera votre version contre la nôtre.» Edifiant. Rendez-vous est pris deux semaines plus tard lors de l’entretien préalable au licenciement, dont la convocation lui a été remise lors de l’entrevue. Nadine tente alors de s’expliquer de nouveau mais rien n’y fait. Sont remis sur la table ses chiffres ainsi que les tensions survenues avec des collègues. In fine, c’est la rupture conventionnelle ou la porte sans ménagement. Meurtrie, elle se résigne finalement à accepter ce bien mauvais “deal” : «Je ne voulais pas signer la rupture conventionnelle mais on me menaçait d’un licenciement pour faute», résume-t-elle. Une pratique loin d’être exceptionnelle dans cette entreprise, selon Nadine : «J’ai signé, comme beaucoup d’autres.»